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Renaud (Alexandre) Édouard
Article mis en ligne le 6 septembre 2018
dernière modification le 5 septembre 2018

par Desmars, Bernard

Né le 27 janvier 1834 à Besançon (Doubs), décédé le 14 mars 1913 à Nice (Alpes Maritimes). Officier d’infanterie, capitaine des sapeurs-pompiers de Paris. Membre du conseil d’administration de la Librairie des sciences sociales et de l’Union agricole d’Afrique autour de 1870.

Édouard Renaud est le fils d’Hippolyte Renaud, l’auteur de Solidarité (1842), l’un des livres de propagande sociétaire les plus diffusés. En 1852, il entre à l’École spéciale militaire. Sous-lieutenant d’infanterie (1854), il participe à la guerre de Crimée. Promu lieutenant en 1856, il est fait chevalier de la Légion d’honneur en 1857. En 1865, il devient capitaine. Il passe ensuite au régiment des sapeurs-pompiers de Paris, où il reste jusqu’en 1875 [1].

Librairie des sciences sociales et Union agricole d’Afrique

C’est pendant cette période parisienne qu’il fréquente le Centre de l’École sociétaire réorganisée par François Barrier. En 1869 ou 1870, il prend des actions de la société anonyme qui exploite la Libraire des sciences sociales et qui publie La Science sociale [2]. Après la mort de Barrier, le 9 juillet 1870, Édouard Renaud le remplace au conseil d’administration de la société anonyme qui gère la Librairie des sciences sociales [3]. En 1872, il acquiert de nouvelles actions – ainsi que son père Hippolyte [4]. Il participe alors régulièrement aux réunions du conseil d’administration et aux assemblées générales des actionnaires de la Librairie des sciences sociales.

Il intervient également à la même époque dans l’administration de l’Union agricole d’Afrique, une société fondée en 1845-1846 par des fouriéristes lyonnais pour exploiter des terres situées près d’Oran en y appliquant quelques principes sociétaires. Son père avait alors fait partie du conseil d’administration de la société. Édouard figure sur une liste d’actionnaires datant de la fin des années 1860, la première publiée depuis 1852. Il est élu en 1868 au conseil d’administration de la société et il en est nommé le secrétaire ; il s’occupe notamment du classement des archives, de la mise à jour du fichier des actionnaires et de la correspondance qui souffre alors de beaucoup de retard [5].

Il entre dans le conseil d’administration de l’Union agricole à un moment où l’orientation de la société suscite des débats. En effet, depuis le milieu des années 1850, les administrateurs, confrontés à d’importantes difficultés financières, louent les terres à des colons et à des indigènes et se contentent de percevoir des fermages, ce qui leur permet de rembourser les dettes et de distribuer des dividendes aux actionnaires. À la fin des années 1860, l’amélioration de la situation financière et l’entrée au conseil d’administration de nouveaux membres comme Henri Gautier, l’un des fondateurs de la société, favorisent l’adoption de projets plus conformes aux intentions initiales et aux aspirations fouriéristes. Édouard Renaud est l’un de ceux qui soutiennent cette réorientation. En avril 1870, un « comité spécial » de trois membres, dont Gautier et Renaud, est chargé de mener les « études préparatoires » pour le retour au faire-valoir direct, la restauration des pavillons existants et la construction d’un « grand bâtiment central » [6]. Renaud est réélu au conseil d’administration en 1871. Cependant, lors de l’assemblée générale des actionnaires en 1872, il semble en désaccord avec certains de ses collègues ; sans doute leur reproche-t-il leur absentéisme – il demande que soit publié dans le Bulletin de l’Union le relevé des présences aux séances du conseil, ce à quoi s’opposent plusieurs administrateurs ; il propose aussi la nomination d’un responsable ayant les compétences nécessaires pour assurer la mutation de l’Union agricole. Là encore, plusieurs autres administrateurs, dont Henri Gautier, dénoncent ce qui leur apparaît comme une marque de défiance à leur égard [7].

En 1873, il démissionne du conseil d’administration de l’Union du Sig ; il est remplacé par Victor Considerant.

Mémoire du mouvement fouriériste

En 1875, il quitte les sapeurs-pompiers de Paris et rejoint un régiment d’infanterie, à Tarbes (Hautes-Pyrénées), puis à Castres (Tarn) ; promu chef de bataillon en 1881, il est fait officier de la Légion d’honneur l’année suivante. Il obtient sa retraite en 1886. Il s’installe à Grasse (Alpes-Maritimes), puis à Nice (Alpes-Maritimes) [8].

À la fin des années 1890, il est relation avec l’École sociétaire. Il fournit en 1897 à Adolphe Alhaiza, le directeur de La Rénovation, des informations pour rédiger un article biographique sur Hippolyte Renaud [9]. Il apporte son soutien pécuniaire au groupe de La Rénovation [10]. Il finance, au moins en partie, la réédition en 1898 de Solidarité, publié pour la première fois par son père en 1842 [11]. Il contribue à la rédaction de La Rénovation en alimentant une rubrique « Les précurseurs de Fourier », qui réunit, selon Alhaiza, « une série de pensées, de citations, d’aphorismes empruntés aux intelligences sommitales de tous les temps et en harmonie avec la doctrine intégrale que Fourier devait résumer » [12]. Ces « précurseurs » sont Aristote, Condillac, Montesquieu, Platon, Pythagore, Rousseau, etc. Il apporte aussi sa contribution financière – 188 francs – à la réalisation de la statue de Fourier [13].

Mais à la fin des années 1890, Alhaiza s’engage dans le camp antidreyfusard et fait de La Rénovation un organe antisémite et xénophobe. Comme quelques autres lecteurs du périodique fouriériste, Édouard Renaud dénonce cette orientation auprès du directeur de La Rénovation ; certes, il est en accord avec lui sur la question sociale et sur la nécessaire association entre le capital, le travail et le talent ;

Mais vous accompagnez votre démonstration d’attaques personnelles et collectives dans le voisinage desquelles mon nom devrait d’autant moins se trouver que j’avais dû, à regret, en décembre dernier, demander la radiation de la liste des abonnés de La Rénovation, ne pouvant associer ce nom à la continuité d’une polémique de violence que je réprouve de toutes mes forces... et qui jure avec les sentiments de générosité et de persuasion de l’auteur de Solidarité, mon père.

Il termine ainsi sa lettre :

Sentiments cordiaux, M. le Directeur, sur le terrain du Progrès pacifiquement préparé et conquis [14].

On ne voit plus ensuite le nom d’Édouard Renaud apparaître dans la documentation fouriériste.