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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Houry (née Gouhenant), Anastasie, dite Anna
Article mis en ligne le 22 janvier 2017
dernière modification le 26 juin 2022

par Desmars, Bernard

Née le 18 juin 1831 à Lyon (Rhône), décédée le 12 novembre 1906 à Paris, 12e arrondissement (Seine). Féministe. Membre de l’École sociétaire fin XIXe-début XXe siècle. Abonnée à La Rénovation, convive des banquets fouriéristes, souscriptrice aux statues de Fourier et de Considerant.

Fille d’un fabricant de couleurs lyonnais, Anastasie Gouhenant épouse en 1853 Charles Houry, un peintre d’origine belge installé en France. Dans les années 1870, elle est membre de la Société pour l’amélioration du sort des femmes. Aux côtés de Maria Deraisme, d’Anna Féresse-Deraisme, d’Hubertine Auclert et de quelques autres, elle signe – avec le prénom Anna, qui est son prénom usuel – une lettre adressée à Victor Hugo pour lui demander de soutenir le combat pour l’émancipation des femmes [1]. En 1878, lors du congrès international du droit des femmes qui est organisé à Paris, elle fournit une contribution qui est lue par Léon Richer [2]. Elle apporte en 1889 son aide financière à l’organisation du Congrès français et international du droit des femmes [3].

On ne la voit participer au mouvement fouriériste avec son mari qu’à partir de la fin des années 1880, quand l’École sociétaire est réorganisée sous la direction d’Hippolyte Destrem. Le couple s’abonne très tôt à La Rénovation, organe phalanstérien publié à partir de 1888, ce qui lui vaut d’appartenir à la catégorie honorifique des « fondateurs » [4]. En 1894, Adolphe Alhaiza succède à Destrem ; sa présence à la tête du mouvement fouriériste est contestée par certains disciples. Anna Houry fait partie d’un « comité » ou « groupe actif » mené par Étienne Barat et ayant pour but d’encadrer l’activité d’Alhaiza. Cette défiance se traduit bientôt par une dissidence, puis une véritable scission à laquelle ne participe pas Anna Houry, qui reste finalement du côté d’Alhaiza [5].

Dans la seconde moitié des années 1890, toujours abonné à La Rénovation, le couple Houry apporte sa contribution financière à la réalisation de la statue de Fourier et participe en décembre 1897 à l’examen de la maquette réalisée par le sculpteur Émile Derré.

Après la mort de son mari, survenue en 1898, Anna Houry continue à participer aux activités de l’École sociétaire. Elle assiste à l’inauguration de la statue de Fourier, le 4 juin 1899 [6]. Puis, elle souscrit à la statue de Victor Considerant [7] et elle se rend à Salins où est érigé le monument le 4 août 1901. Seule représentante du mouvement fouriériste à s’être déplacée, elle est invitée à siéger dans la tribune officielle, avec le ministre de la Guerre, le préfet du Jura, le maire de Salins et le général commandant le 7e corps d’armée. « Modeste phalanstérienne », elle refuse d’abord d’occuper son siège ; « mais Mme Gagneur et Mme Syamour [qui a réalisé la statue] insistant de leur côté », elle finit par accepter. Le maire la présente alors au ministre comme « une amie de Considerant ».

Le soir même, elle envoie une lettre à Alhaiza pour exprimer sa satisfaction.

Monsieur et cher Condisciple

Très intéressant, très émouvant même le mouvement qu’a provoqué la cérémonie, ou plutôt la manifestation au sujet de l’érection du monument de Victor Considerant. On ne distingue plus les nuances qui se fondent dans l’hommage rendu au disciple et continuateur de Fourier, à son explicateur, à son résumeur [8].

Elle continue à fréquenter les manifestations de l’École sociétaire d’Alhaiza auquel elle reste fidèle, même quand il exprime des opinions antisémites et xénophobes et particulièrement hostiles à Zola et à Jaurès [9] ; elle lui écrit alors :

Vous avez la conviction et le courage d’un apôtre ; mais il y a un petit point qui nous sépare : vous êtes exclusif, moi pas [10].

En 1903, l’École sociétaire, pour se mettre en conformité avec la loi de 1901, adopte des statuts. Anna Houry fait partie des six fouriéristes qui forment officiellement l’association [11].

Elle maintient son engagement féministe. En 1903, La Rénovation publie un texte où elle réclame l’égalité des droits entre les hommes et les femmes, et en particulier « le suffrage vraiment universel, féminin comme masculin » [12]. D’après Alhaiza, elle a, à une époque non précisée, exprimé ses convictions dans une brochure intitulée Une mère de famille  ; elle y répond notamment à des propos misogynes d’Alexandre Dumas [13].

La Rénovation annonce ainsi son décès :

Un grand malheur bien inopiné vient de frapper l’école et nous cause une peine des plus vives.

Mme Anna Houry, atteinte par une maladie soudaine, a succombé le 12 novembre dernier. […]

Tous nos condisciples parisiens, particulièrement, partageront notre chagrin et n’oublieront jamais leur fidèle présidente de nos banquets anniversaires de chaque 7 avril, où sa grâce aimable et son talent musical charmaient tout le monde [14].