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Orrit, (Paul) Eugène
Article mis en ligne le 12 décembre 2023
dernière modification le 10 décembre 2023

par Sosnowski, Jean-Claude

Né vers 1817. Décédé le 3 juin 1843. Correcteur typographique. Poète.

Eugène Orrit est le fils de Marie Rose Lafargue et d’Antoine Orrit.

Né de parents malheureux, élevé dans la plus affreuse misère, il sentit au sortir du berceau le poids de l’existence ; avec une constitution très-faible, il s’adonna au travail de l’intelligence dès ses premières années ; à l’âge de 5 ans, il s’apprit de lui-même à lire et à écrire en très-peu de temps, et de là, toujours appliqué sur les livres, sentant le besoin de sortir de l’état abject où le retenait l’indigence, il s’appliqua à acquérir des connaissances suivant ses goûts […] [1].

Tels sont les mots de sa mère. Plusieurs sources donnent une version contradictoire de la situation familiale. L’acte reconstitué de naissance d’un jeune frère, Joseph Antoine Félix, indique que son père est, en mai 1825, « ancien pharmacien » ; l’acte reconstitué de décès de son père indique que celui-ci est en juin 1843, « rentier, âgé de cinquante-neuf ans, né à Arbeca (Espagne) » ; enfin, selon l’un des biographes d’Eugène Orrit, son père, a été « longtemps emprisonné pour dettes » puis « avait été forcé de se faire apprenti correcteur » [2] dans une imprimerie.

Selon les différents témoignages, Eugène Orrit est un temps accompagné dans son apprentissage par le pédagogue Joseph Jacotot [3] ; il apprend la langue espagnole, langue maternelle de son père, en étudie la littérature, apprend également l’anglais auprès d’un professeur, Johnson [4]. Eugène Orrit devient correcteur d’imprimerie chez Fain et Thunot [5]. Il s’adonne à la poésie et publie un premier recueil, Les Soirs d’orage, en 1841. Le livre n’a aucun succès.

Sans être encore membre de l’École phalanstérienne, Eugène Orrit reçoit cependant une critique favorable du Premier Phalanstère pour ce recueil : « un rayon d’espoir semble l’éclairer à la fin de l’ouvrage ; il est frappé par le génie de Fourier, mais il craint de croire à ses rêves ». Le Premier Phalanstère lui lance un appel à rejoindre le mouvement :

Venez à nous. La science sociale donne la vie, guérit les plaies de notre âme, elle nous élève vers Dieu. Laissez cette douloureuse poésie qui se meurt faute de foi. Venez avec nous lire dans le livre de la nature, la grandeur, la sagesse et la justice du créateur. Une âme comme la vôtre saura sentir, comprendre et admirer [6].

Le message paraît avoir été entendu. Il est annoncé comme l’un des orateurs de la « séance littéraire » [7] du groupe du Nouveau Monde qui doit se dérouler le 22 août 1841, au 12 rue Taranne [8]. Il intervient aux côtés d’Arthur de Bonnard, de Jean Czynski, d’Eugène Stourm, de Antoine Boissy, de Pierre Lachambaudie et de deux femmes non citées.
Quelques mois plus tard, lors du décès d’Eugène Orrit, Victor Meunier, dans La Revue synthétique le présente comme « un ami » [9]. Le père d’Eugène Orrit décède deux jours plus tard laissant un autre fils de 17 ans (Joseph Antoine Félix), également correcteur d’imprimerie. Père et fils sont inhumés au cimetière Montparnasse selon le témoignage de sa mère [10] qui perpétue sa mémoire en adressant ses œuvres à Sébastien Rhéal qui en assure la publication. Alphonse Viollet, l’un de ses biographes, souhaite « montrer comme socialiste ce poète infortuné, méconnu de son vivant, qui dans ses veilles et ses travaux surhumains, tua son âme mille fois, avant de mourir, et dont la mémoire, à part quelques éloges tronqués, n’a été rappelée que pour l’insulte et le mépris  [11] ».