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Gierkens (également orthographié Jierkiens, parfois Jeirkins ou Jerkiens), Albert
Article mis en ligne le 2 septembre 2019
dernière modification le 27 décembre 2021

par Sosnowski, Jean-Claude

Né à Chaumont (Haute-Marne) le 20 ventôse an X (11 mars 1802). Décédé à Rio de Janeiro (Brésil) le 5 (?) octobre 1884. Ouvrier cordonnier à Lyon puis cordonnier à Rio de Janeiro de 1846 à 1860. Président de l’Union harmonienne avant août 1839 à Lyon. Membre du Groupe phalanstérien des travailleurs lyonnais. Proche du docteur Mure qu’il rejoint au Brésil en 1843. Trésorier de la société de colonisation l’Union industrielle à Rio de Janeiro. Participe au banquet anniversaire du 7 avril 1846 à Rio de Janeiro. Souscripteur pour la tombe de Flora Tristan en 1846. Membre actif de la Société française de secours mutuels de Rio de Janeiro.

Albert Gierkens [1] est fils de Jean-Louis Girkins, tonnelier à Chaumont, et de Marie Compagnot. Ouvrier cordonnier petite rue Mercière à Lyon, le 18 novembre 1823, il épouse, en premières noces, Benoîte Toutant. Un enfant, Louis-Jean, naît le 2 août 1824. Benoîte Toutant décède le 27 mai 1825. Albert Gierkens réside alors 32 rue Dubois. Il épouse en secondes noces Françoise Guygon le 15 juillet 1828. Il est domicilié rue Groslié. Le couple a trois enfants : Albert Joseph, né le 8 mars 1829, Marguerite Anaïs, née le 7 août 1830 et enfin Elmire née le 1er mai 1836. Le couple Gierkens habite 18 rue Petit-Soulier à Lyon. Gierkens est toujours ouvrier cordonnier et sa femme ouvrière en soie selon le recensement fiscal de l’année 1830. Leur situation est identique en 1835 lorsqu’avec sa femme, Albert Gierkens [2] contribue au projet lyonnais de fondation de l’épicerie sociale ou commerce véridique de Michel Derrion pour la somme de 2 francs. Le couple n’est plus recensé à ce domicile après 1842.

C’est probablement Albert Gierkens [3] qui participe au banquet anniversaire de la naissance de Fourier donné à Lyon en avril 1840 par le Groupe phalanstérien des travailleurs lyonnais. Il est présenté comme ancien président de l’Union harmonienne. Dans un discours improvisé, il rend hommage à Zoé Gatti de Gamond et à son ouvrage Fourier et son système. « Cette publication [...] doit servir de lien fraternel parmi les disciples de Fourier » déclare-t-il. Il estime que « la France par l’élite de ses travailleurs » est « le candidat de l’union [...] pour fonder le premier phalanstère ». Il [4] intervient également lors du banquet organisé pour l’anniversaire de la mort de Fourier par le Groupe phalanstérien des travailleurs lyonnais en octobre 1841 en donnant lecture d’une lettre du groupe parisien du Nouveau Monde.
En 1843 (avril ou décembre), avec Rouffinel, il effectue le voyage du Brésil lors d’une des deux expéditions du Curieux affrété pour le transport de nouveaux colons destinés à l’établissement d’un phalanstère [5]. Albert Gierkens et l’un de ses fils [6] retrouvent probablement le docteur Mure qui a quitté la colonie du Sahy avec sa femme, une nièce et une servante en août 1843 [7]. Albert Gierkens et son fils [8] sont signataires d’un courrier de soutien adressé par le groupe phalanstérien de Rio de Janeiro à Joseph Reynier à Lyon. Reynier doit s’expliquer devant la Société mutualiste de Devoir mutuel dont il est membre suite aux accusations de deux colons désenchantés par l’expérience brésilienne. Ces deux anciens colons l’accusent d’avoir « envoyé de nombreuses familles en esclavage » [9]. Albert Gierkens est alors trésorier de l’Union industrielle à Rio de Janeiro. Il s’agit de la société fondée par Derrion, Jamain et Arnaud, ce dernier en étant président, pour recruter les colons pour l’établissement d’un phalanstère au Brésil. Albert Gerkiens participe au banquet du 7 avril 1846 célébrant la naissance de Charles Fourier, organisé par le groupe phalanstérien réunifié autour de Michel Derrion à Rio de Janeiro. Il y prononce un toast « à l’influence morale des femmes » [10]. Cette même année, il contribue aux souscriptions pour une « médaille à offrir à Eugène Sue, défenseur des classes sacrifiées et promoteur de l’organisation du travail » [11] et pour la tombe de Flora Tristan [12].
Il s’est tout récemment installé comme cordonnier, 61 rua dos Latoeiros. Son magasin est alors spécialisé dans les chaussures pour femmes ; il recherche par ailleurs un apprenti [13]. De 1847 à 1860, il est cité dans l’Almanak administrativo mercantil e industrial do Rio de Janeiro parmi les cordonniers de la ville. Il propose des chaussures pour hommes, femmes et enfants. Gierkens est investi dans la Société française de secours mutuels fondée en octobre 1856. Il appartient à l’une des commissions chargées du suivi des malades [14]. Il est encore commissaire de la société du 15 septembre au 15 octobre 1860.
Il cesse alors son activité de cordonnier en octobre 1860. Une vente aux enchères de son fonds est annoncée pour le 13, Gierkens retournant en Europe (« que se retira para Europa ») [15]. Le 25 octobre 1860 [16] il embarque pour Bordeaux sur le paquebot Béarn de la Compagnie des messageries impériales. Cependant le 26 mars 1861, le nom d’Albert Gierkens est enregistré parmi les passagers de l’Estrémadure, bateau de la même compagnie en partance pour le Brésil [17]. Le 17 avril, il débarque à Rio de Janeiro [18]. Il s’investit de nouveau au sein de la Société française de secours mutuels. Le 30 janvier 1862, il est désigné membre du bureau provisoire chargé d’organiser immédiatement l’élection d’un nouveau comité, le comité sortant désavoué ayant démissionné. Gierkens n’appartient à aucun des deux comités [19].
En 1865, une reconnaissance de privilège concernant la construction d’un appareil destiné à lever et transférer des liquides est accordée à Alberto Gierkens sans que nous puissions déterminer lequel du père ou du fils est concerné [20]. En février 1867, Alberto Gierkens, résidant à Rio de Janeiro, est associé à Régis Conteville, directeur à Paris, dans une entreprise de serrurerie, de machines à coudre, de cuisinières, et de balances et leurs accessoires installée 101 rue de San José [21]. Des annonces publicitaires paraissent au cours de l’année 1868 [22]. Le 24 mars 1869, la société est dissoute à l’amiable [23]. Le 9 octobre 1869, Le Journal officiel de l’Empire français annonce la dissolution de la société Conteville et Gierkens, par acte de Me Robert, notaire, en date du 2 octobre [24]. On peut supposer que l’associé de Conteville est Albert Gierkens, père. En effet, un avis de funérailles est paru dans le Jornal do Commercio (Rio de Janeiro) des 2 puis 6 janvier 1868 annonçant le décès d’Albert Gierkens fils pour lequel une messe doit être célébrée le 7 janvier dans l’église San Francisco de Paulo. La famille semble parfaitement intégrée à la ville très catholique de Rio de Janeiro. Un an plus tard, Albert « Gierkens, ses petits fils [sic] et filles, M. et Mme Hallier prient les personnes de leur connaissance de bien vouloir assister à la messe du bout de l’an de leurs fils, père, frères, beau-frère [...] » [25] donnée dans la même église le 2 janvier. Une dissension semble exister entre la veuve non citée dans l’annonce et son beau-père. Le jour même la veuve en son nom et ceux de son fils « Cloves » et du beau-frère Alphonse Sauvat fait paraître une annonce pour célébrer une messe anniversaire à l’église Santissimo Sacramento, 30 minutes avant l’office commandé par Albert Gierkens [26].
Le nom d’Albert Gierkens est encore mentionné en mars 1878 comme mandataire des héritiers de « Diniz Rosée » [27] lors d’un inventaire dressé pour la succession de celui-ci. Mais, le 10 octobre 1884, le Jornal do Commercio annonce le décès d’Albert Gierkens. Ce sont ses filles Elmire Hallier et Anaïs Dos Santos Cabral, ses petits-enfants dont Clovis Gierkens qui invitent proches et amis à une messe du septième jour (« missa de setimo dia ») à l’église San Francisco de Paula le samedi 11 octobre 1884 [28].