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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Hempel, Charles Julius
Article mis en ligne le 13 mars 2017
dernière modification le 26 mars 2017

par Desmars, Bernard

Né le 5 septembre 1811 à Solingen (Prusse), décédé le 25 septembre 1879 à Grand Rapids, Michigan (États-Unis). Médecin homéopathe. Traducteur et auteur de plusieurs ouvrages, en particulier sur l’homéopathie. Membre de la Société fouriériste de New York ; participe à une tentative de colonisation au Texas, vers 1840 ; membre d’une phalange, la Sylvania Association in Pennsylvania.

Charles J. Hempel fait ses études à Solingen (Prusse) ; en 1831, il rejoint Paris où il vit de travaux de traduction. Il suit des cours de Gay-Lussac à la faculté des sciences, mais aussi des cours de médecine dispensés par François Broussais, ainsi que le cours

Charles Julius Hempel (coll. Sylvain Cazalet)

d’histoire de Michelet, suppléant de Guizot à la faculté des lettres ; il se rend encore au collège de France. Il fréquente des saint-simoniens, mais sans adhérer véritablement à leur doctrine [1].

Fouriériste aux États-Unis

Ses relations avec Michelet sont alors assez étroites ; il vit pendant six mois dans la famille de l’historien et l’aide dans ses recherches sur l’histoire de la France [2]. Dans la première partie des années 1830 (en 1832 ou 1835 selon les sources), il part ensuite aux États-Unis ; il réside chez Pietro Maroncelli, ancien carbonaro italien, ayant séjourné au début des années 1830 à Paris où il a adhéré aux idées fouriéristes, et installé aux États-Unis en 1833. Hempel s’imprègne alors de la littérature et de la musique italiennes. Maroncelli lui parle aussi de Fourier et lui prête un exemplaire de la Théorie des quatre mouvements. Hempel est surpris par « la nouveauté et l’étrangeté » du contenu ; mais il est convaincu que « la vérité [est] là » et que « la grande question de la destinée humaine [doit] être étudiée dans ce remarquable volume » [3].

Maroncelli l’introduit auprès de Jean Manesca, l’un des principaux propagandistes américains et secrétaire de la société fouriériste de New York [4]. Il le met aussi en relation avec diverses personnalités scientifiques, littéraires et politiques américaines parmi lesquelles plusieurs adhèrent au fouriérisme : le journaliste Parke Godwin, Charles Dana et surtout Albert Brisbane.

À la fin des années 1830, Hempel accroît son activité en faveur de la cause sociétaire ; en 1838, il remplace Jean Manesca, qui vient de décéder, au secrétariat de la société fouriériste de New York [5]. Le 7 avril 1839, il participe au banquet organisé à New York pour célébrer l’anniversaire de la naissance de Fourier. Lors de cette fête, présidée par « Piero [sic] Maroncelli ». Il prononce un toast « à l’éducation harmonique » [6]. La Phalange signale en août 1839 la prochaine installation au Texas d’un petit groupe de colons ;

grâce au zèle de nos amis de New York, une réunion de cinquante familles allemandes qui va se fixer au Texas a pris la résolution de se développer non sur les bases anciennes, mais autant que possible, eu égard aux conditions dans lesquelles elle se trouve, sur les bases mêmes de l’association phalanstérienne. La première colonne est partie de New York, le 16 mai dernier, sous la direction de notre ami M. F.-P. Gaertner […] et de M. J. Hempel dont le nom a déjà figuré dans La Phalange [7].

On ignore si la colonie a vraiment été constituée. En 1841, Hempel contribue financièrement à la création de l’une des premières phalanges américaines, la Sylvania Association in Pennsylvania [8]. En 1845, il admire toujours Fourier, auquel il associe Swedenborg. Il écrit à Michelet, « après dix ans de silence » :

La France pour moi a acquis un intérêt puissant et presque magique par les hommes dédaignés par les hommes de sciences et les puissants du monde, je veux dire Charles Fourier, l’auteur de la théorie sociétaire. Je ne connais pas vos sentiments relativement à la doctrine de l’association universelle ; quant à moi je déclare que je ne me suis senti homme que dès le moment que j’eus l’avantage immense d’être mis à même d’étudier les ouvrages du grand messie que la France a fait naître, et de cet autre grand messie, Swedenborg, qui, du haut du pôle, a lancé ses éclairs de lumière céleste au milieu des ténèbres qui ont enveloppé le génie humain. Depuis neuf ans je n’ai fait qu’étudier les doctrines de ces grands hommes, et j’espère que, dans quelques mois, j’aurai le bonheur de communiquer au monde les résultats de mes méditations. Dieu merci, grâce à Fourier et à Swedenborg, mon âme est devenue tranquille ; au fond de mon cœur, j’ai la conscience de la belle destinée d’harmonie qui attend l’humanité entière, j’ai une perception claire et précise de cette destinée, je vois comment l’humanité marche au-devant d’elle et comment chaque fait, chaque idée, chaque passion deviendrait, dans la plénitude du temps, des hymnes de gloire au Dieu qui nous gouverne.

Mes études m’ont conduit dans le domaine des sciences naturelles ; je me suis fait faire docteur en médecine ; mais vous concevez que les sciences ne sont pas, pour moi, des faits isolés ; j’étudie tout ce qui est en rapport avec la science sociale, et mon plus grand désir est de laisser au monde un ouvrage digne des génies qui m’ont inspiré [9].

En 1848, il publie un livre dans lequel il présente une « nouvelle Église », fondée sur « les vérités sublimes annoncées par Swedenborg et exprimées scientifiquement par Fourier » ; il termine l’ouvrage en appelant à la formation d’une « union » ou d’une « alliance universelle », dont les adhérents s’engageraient à rester « unis dans l’Amour et la Sagesse » et travailleraient à la formation d’une phalange [10].

Enseigner et propager l’homéopathie

Cependant, depuis le milieu des années 1840, Hempel se consacre surtout à la médecine et en particulier à l’homéopathie, à laquelle il se serait intéressé dès sa jeunesse. Il approfondit ses connaissances et publie avec John F. Gray The Homoeopathic Examiner en 1843. Il obtient son diplôme de médecin en 1845 à l’université de New York. Sa thèse, Eclecticism in Medicine, est publiée chez l’éditeur William Radde qui l’emploie pendant plusieurs années ; il traduit et publie des ouvrages sur l’homéopathie parus en Europe, dont les principales œuvres de Hahnemann et des homéopathes les plus connus.

Mais ces traductions, qui comportent quelques erreurs et qu’il enrichit parfois de commentaires issus de sa propre expérience, de ses lectures et de ses propres réflexions, suscitent des critiques de la part de ses confrères homéopathes et il entre en conflit avec plusieurs d’entre eux. Lui-même rédige plusieurs ouvrages (Homoeopathic Domestic Physicians en 1846, livre traduit en allemand et en français en 1854 ; A New and Comprehensive System of Materia Medica and Therapeutics en 1859) dans lesquelles apparaissent des divergences par rapport aux théories d’Hahnemann et de ses disciples. Ses publications montrent une véritable fascination pour l’aconit, un produit issu de l’aconitum, pouvant guérir selon lui à peu près toutes les maladies dont souffre l’humanité.

Il se marie en 1855 avec la fille de l’un des fondateurs de la ville de Grand Rapids (Michigan). De 1857 à 1860, il enseigne au Hahnemann Medical College de Philadelphie. Après la mort de son beau-père, il s’installe en 1861 à Grand Rapids, où il a de nombreux patients. Il est membre honoraire de la British homoepathie Society ; il est reçu dans de nombreuses sociétés médicales. Il enseigne, brièvement à la chaire d’homéopathie tout juste créée à l’université du Michigan, ainsi qu’au Central Michigan Homeopathic Institute, à Lansing (Michigan).

Au début des années 1870, il effectue un voyage en Prusse et en Italie, notamment en raison de problèmes de santé et plus particulièrement d’une baisse de sa vision qui l’amène à consulter des ophtalmologues. Cependant, son état s’aggrave. Revenu dans sa maison de Grand Rapids, il devient progressivement aveugle et paralysé. Il dicte alors ses travaux à sa femme, travaillant jusqu’à sa mort en 1879.