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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Quéru, Jacques-Edmond
Article mis en ligne le 21 novembre 2016
dernière modification le 13 décembre 2022

par Sosnowski, Jean-Claude

Né à Paris (Seine) le 2 mars 1811. Négociant. Membre du groupe lyonnais de l’Union harmonienne en 1837 et correspondant pour l’année 1840.

Le 9 avril 1833, Jacques-Edmond Quéru épouse à Lyon (Rhône), Victoire Louise Chalmas. Il est alors commis-négociant résidant place de la Charité à Lyon. Il est le fils d’un rentier Alexis-André Quéru demeurant à Meaux (Seine-et-Marne) et de Jeanne-Françoise Bertrand. Son épouse est née à Lyon le 23 décembre 1812 du mariage de Jean-François Chalmas, teneur de livres en 1833 et de Jeanne-Victoire Benoit. Un premier enfant, Jean-François-Victor est déclaré à Lyon le 18 avril 1834. Jacques-Edmond Quéru est dit négociant. Le 17 décembre 1836 lors de la déclaration de naissance d’une fille Marie-Amélie, le couple demeure au 24 rue Poulaillerie à Lyon. En 1837, Quéru est établi 1 rue de Puzy. Il est corroyeur associé (Maison Chalmas et Quéru) et possède un magasin place de la Charité. En 1838, il dépose un brevet d’invention « pour un moyen de culoter [sic] promptement les pipes par un procédé chimique » [1]. Il s’agit de « noircir les pipes en terre à la première chaleur » explique-t-il lors du dépôt de sa demande de brevet. Il met en exergue le sentiment national, « le fumeur de notre pays se fait une sorte de gloire de posséder une pipe bien culotée [sic] » [2]. Il est établi comme fabricant à La Guillotière, quartier des rivières. Il réside néanmoins 4 rue de la Gerbe à Lyon lors de la déclaration de naissance de son fils Adrien-Marius le 20 avril 1838. En 1839, il est recensé 52 quai de Serin à la Croix-Rousse. Il y est locataire, et exerce comme fabricant de pipes associé à Adolphe Tessonnier. Il n’y est plus l’année suivante. Le 2 septembre 1840, lors de la déclaration de naissance de son fils Louis-Antoine, il est dit négociant en parfumerie et demeure 39 montée du chemin-neuf à Lyon. Le recensement de l’année le présente comme commis, et il est seul à être recensé à cette adresse. L’année suivante il a de nouveau déménagé, le logement est inoccupé. En avril 1848, lors du décès de son fils Jean-François-Victor, on le retrouve comme commis voyageur chez une couturière, la veuve Gay, 14 rue des Trois-Maries à Lyon.

Il est abonné à La Phalange en 1837. Après les obsèques de Charles Fourier, il présente le 2 novembre 1837 une « protestation » aux membres de l’Union harmonienne de Lyon à la suite du compte rendu donné par La Phalange. Approuvé unanimement par les membres présents du groupe, le texte est publié dans la Correspondance harmonienne. Quéru s’insurge contre les obsèques catholiques organisées par le centre parisien de La Phalange :

[…] « à trois heures le convoi funèbre se mit en marche et se dirigea vers l’église des Petits pères. Un service fut célébré sur le corps déposé au milieu du chœur »… et de ces deux nouvelles je ne sais quelle a été pour moi la plus déchirante. Quoi ! Charles Fourier, le révélateur de la loi de joie et d’évidence, vient d’être traîné par-devant le prêtre de la loi de contrainte et de sacrifice ! - N’a-t-il pas assez essuyé de dégoûts et d’humiliations pendant sa vie, faut-il encore qu’il soit outragé après sa mort ? - Il le faut : de soi-disant disciples auxquels il s’était confié l’ont voulu. Il faut qu’après sa mort on lui fasse faire une humiliante rétractation de sa doctrine aux pieds du prêtre romain ! il faut qu’après sa mort, celui qui mit à découvert toutes les ruses, toutes les fourberies du mercantilisme, vienne demander humblement un peu de prière pour son argent.
Disciples de Paris ! vous avez bien compris l’acte solennel que vous venez d’accomplir ? Avez-vous bien compris ce que signifiait le corps de notre maître aux pieds du prêtre de Rome ? N’avez-vous pas frémi de honte à l’aspect de corps sacré, écrasé sous le poids du bénitier ? Ne vous êtes-vous pas aperçus que chaque goutte de cette eau glissait sur ce cercueil et allait rejaillir sur ses divins livres où, prenant une teinte noire et funèbre, elle couvrait la plupart des pages et les anéantissait [sic].
Vous rappelez-vous quel miracle s’accomplit à la mort du Christ : « Alors les tombeaux s’ouvrirent, les morts ressuscitèrent, les pierres se fendirent, le rideau du temple se déchira en deux… »
Savez-vous à cette heure quel miracle s’accomplit aux obsèques de Fourier – Cinq cents feuillets se déchirent et tombent de ses livres – et c’est un miracle d’impiété et d’inconséquence.
Ceux qui ont présidé aux funérailles de Fourier, écrivaient, il y a un an, dans le premier numéro de La Phalange, au sujet du christianisme, à l’article Déclaration « Ce qui est mort est bien mort et a dû mourir, si nous touchons la pierre ce ne doit être que pour la sceller », auraient-ils voulu en ce jour solennel singer le miracle de la résurrection des morts ?
Plus tard, ils ont traité la question de la nullité sociale de l’évangile. Plus tard encore, ils ont, dans un article remarquable (De l’unité universelle), dessiné d’une manière tranchée les bases du dogme nouveau ; et hélas ! hier ils ont été mendier les secours du prêtre à la dernière heure. O versatilité inouïe de ces âmes !
[…]
Ce devait être chose bien curieuse et pitoyable à voir que ce service catholique, où se dessinait [sic] d’un côté un clergé, encensant avec dédain les dépouilles de l’homme dont la vie s’est usée à démolir pierre par pierre l’édifice de sa puissance… et de l’autre les soi-disant disciples du défunt, des hommes qui s’annoncent comme devant écraser sous le poids de leur logique, un dogme qu’ils regardent comme retenant l’humanité dans les chaînes de l’absurde et de l’ignorance. […] C’est de la civilisation à son plus haut degré de mensonge et de turpitude [3].

N’espérant aucune réponse des partisans de La Phalange, Quéru s’adresse « aux amis de l’Institut sociétaire » groupe dissident du centre parisien de La Phalange afin de savoir « dans ces graves circonstances [si] Fourier a […] exprimé que sa volonté dernière fût d’être déclaré catholique après sa mort, en recevant les honneurs funéraires catholiques ? - Ou bien les disciples de Paris ont-ils pu penser que l’âme de Fourier avait des expiations à faire et demandait des prières ? ».

Pour l’année 1840, il est annoncé comme correspondant de l’Union harmonienne, 52 quai de Serin à la Croix-Rousse. Il ne semble pas s’impliquer publiquement dans l’un ou l’autre des groupes phalanstériens qui s’organisent à Lyon au cours de la décennie.