Bandeau
charlesfourier.fr
Slogan du site

Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Blanc, Julien, dit « Le petit Blanc », ou « le Blanc des Blancs »
Article mis en ligne le 1er décembre 2021
dernière modification le 25 février 2023

par Bouchet, Thomas, Desmars, Bernard

Né le 26 octobre 1795 à Lyon (Rhône), mort le 31 janvier 1865 à Paris, 17e arrondissement (Seine). Journaliste, écrivain et professeur de français. Membre de la rédaction de La Phalange et de La Démocratie pacifique.

Julien Blanc naît dans un milieu très aisé - son père est négociant à Marseille et allié aux plus grandes familles de la cité phocéenne. Sous le Consulat et le Premier Empire (jusqu’en 1809), il est consul général de France à Naples. Dans les années 1820, il est négociant à Paris où la famille Blanc s’est installée [1]. Il se marie en 1824 avec Jeanne Charlotte Henriette Perciaux, qui décède en 1829.
La famille Blanc perd sa fortune en 1830. Sans doute Julien est-il alors enseignant ; il est un proche d’Henri Boisselle, qui s’efforce de propager la méthode conçue par Gallien dans les années précédentes afin de faciliter l’apprentissage de l’orthographe [2].

Parmi les dirigeants de l’École sociétaire

Il est un temps adepte du saint-simonisme. Il devient ensuite, après avoir lu des livres de Fourier, un militant fouriériste et prend assez rapidement des responsabilités au sein de l’École sociétaire : en 1837, il fait partie des commissaires chargés de contrôler l’usage du fonds prévu pour la préparation d’une « fondation en échelle réduite » [3]. Et alors que le mouvement fouriériste est traversé par des conflits, il signe, avec Olivier Barbier, Jules Bing, Pierre-Jean Chapelain et Théodore Michelot, une lettre dont les auteurs affirment leur soutien à Considerant, alors vivement critiqué par des dissidents [4] ; il assure avec Victor Considerant l’essentiel du travail éditorial et de rédaction pour La Phalange en 1838 et 1839. Dans l’acte de constitution de La Démocratie pacifique, qui succède à La Phalange, Blanc figure comme membre du Conseil supérieur aux côtés de Victor Considerant, de Just Muiron, de Clarisse Vigoureux, et d’anciens de La Phalange. En 1845, il est membre du Conseil de direction de l’Ecole sociétaire.
Selon Charles Pellarin,

Blanc signala surtout son concours [à la rédaction de La Phalange et de La Démocratie pacifique] par la part importante qu’il prit à l’administration et aussi par le contrôle que, du consentement de tous, il exerçait sur la rédaction au point de vue de la syntaxe, dont il possédait les règles en grammairien consommé.

Il suit pour La Démocratie pacifique une grève des charpentiers de la Seine, qui s’étend de juin à août 1845. Puis, il publie un ouvrage qui fait l’histoire du conflit social en intégrant des textes présentant les revendications des ouvriers et les réponses de leurs employeurs, ainsi que le compte rendu des procès lors desquels plusieurs ouvriers sont condamnés à de la prison. Dans son avant-propos, Julien Blanc dénonce « la concurrence anarchique » ainsi que

l’affligeant spectacle de deux classes d’hommes, les maîtres et les ouvriers, continuellement en lutte l’une contre l’autre. Ouverte ou sourde, la lutte, effet, ne cesse jamais entre le maître et l’ouvrier.

Aussi,

les grèves ne sont pas des désordres accidentels ; ce sont des symptômes du mal qui tourmente la société, et à ce titre, elles […] semblent mériter la plus sérieuse attention, l’étude la plus approfondie.

Enfin, conclut-il à la fin de l’ouvrage :

Nous l’avons toujours reconnu et proclamé, l’association du Capital, du Travail et du Talent, les trois forces qui concourent à toute production, est en définitive le seul remède au mal qui mine le corps social, et dont les classes ouvrières ont plus à souffrir que les autres.

Cependant, il souligne les difficultés de la réalisation de cette association et les précautions qui doivent être prises.

Il est, probablement à la même époque, l’auteur de la brochure « Nature des relations que les amis de nos idées doivent établir entre eux ». Les huit feuillets qui composent ce document manuscrit - il est reproduit par Astrid Léger dans son mémoire de maîtrise - sont très utiles pour comprendre les ressorts de la propagande sociétaire et les conseils formulés par Blanc évoquent les directives données dans les années 1840 dans les colonnes du Bulletin phalanstérien. Blanc commence par dénoncer une tendance au sectarisme à son avis préjudiciable à la cause (« Les amis de nos idées ne doivent ni s’affilier à une sorte de franc-maçonnerie phalanstérienne, ni former des associations défendues par la loi. »). Il consacre ensuite des développements concrets et concis à de nombreuses formes d’action proposées : « secrétaires correspondants », « correspondance », « opérations dans chaque localité », « abonnements au Journal [La Démocratie pacifique] », « courtage », « cafés, cercles, etc. », « librairie », « affiches », « livres en lecture », « propagation de la théorie », « sujets de discussion qu’il faut préférer », « sujets de discussion qu’il faut éviter », « lectures », « cotisations locales », « journaux », « actions », « fonds applicables au cautionnement », « fonds nouveaux pour la société de 1840 ». Dans un « résumé » final, Blanc reprend l’essentiel de ses conseils.

En résumé, dans chaque localité on devra agir au mieux des intérêts du développement de nos idées par la persuasion et l’étude ; tenir note des services rendus par chacun, tels que les abonnements faits par telle personne, les souscriptions prises ou déterminées par elle, etc. etc. Donner le double de cet état en ce qui concerne la propagation locale et la propagation générale, à l’administration du journal qui doit centraliser les titres de services rendus.
La recherche, mais seulement par des hommes de dévouement et de science, de nouveaux actionnaires pour la société du 15 juin 1840, et pour celle du 10 juin 1843 ; l’organisation d’une caisse locale de librairie et d’abonnement, l’organisation de courtage ; voilà les seules choses qu’on puisse légalement et administrativement instituer. La propagation individuelle, les cours et conférences, les écrits dans les journaux de la localité, etc. sont des choses essentiellement libres de leur nature, qui ne peuvent avoir rien d’uniforme.


Des propos de Blanc, on retiendra le souci de légalité, l’insistance sur la nécessaire stabilisation financière de l’École pour assurer son avenir, l’articulation entre action locale et contrôle central, le rôle dévolu à la presse. Blanc invite enfin au pragmatisme, même si le débat d’idées en sort appauvri : « nous croyons qu’il faut éviter de se lancer dans de grandes discussions métaphysiques, dans lesquelles on parle longuement sans arriver toujours à de bons résultats » ; outre la métaphysique, il vaut mieux éviter les questions religieuses pour ne pas heurter les lecteurs ou les auditeurs (« notre doctrine est omni-compréhensive, [...] elle est assez large pour donner satisfaction à toutes les grandes manifestations de l’esprit humain »), ainsi que les questions de cosmogonie qu’il ne convient de n’aborder « que comme des objets de curiosité, comme des spéculations de l’esprit dignes d’attention et d’intérêt »). Le post scriptum mérite lui aussi qu’on s’y arrête : Blanc souligne qu’il vaut la peine de prendre des renseignements, localement, sur « les chances probables d’une élection phalanstérienne, dans le cas où il y aurait un député à élire. » Et de poursuivre : « Il serait fort avantageux que nous puissions un jour faire arriver à la Chambre Considerant ». Ainsi Blanc relaie-t-il fidèlement les réorientations définies par le chef de l’Ecole sociétaire dans les années 1840.

L’enseignement de l’orthographe

En septembre 1846, Julien Blanc ouvre un cours « d’orthographe et de grammaire pratique en 60 leçons d’après [une] méthode expéditive et attrayante », chez lui, au 63 rue Sainte-Anne à Paris. Le cours est ouvert pour une seconde session à compter de février 1847. Des élèves adultes des deux sexes sont admis, « des places particulières sont réservées aux dames ». Le seul prérequis est celui de « l’habitude d’écrire » ; le souvenir des règles de grammaire acquis « durant la jeunesse » importe peu. L’apprentissage se fait selon un rythme de trois leçons hebdomadaires durant cinq mois moyennant 20 francs mensuels ou bien 85 francs payés par avance pour l’ensemble des leçons.

L’annonce du cours de Julien Blanc
La Démocratie pacifique, 31 janvier 1847

Dans les années 1850, Blanc se consacre principalement à l’enseignement. Il fait une « exposition publique d’un cours d’orthographe », qui peut intéresser, non « seulement les personnes dont l’éducation a été incomplète », mais aussi « beaucoup d’hommes instruits qui, après avoir fait leur humanité, hésitent encore sur l’orthographe de certains mots » [5].
Il publie au début des années 1860 plusieurs manuels proposant une nouvelle méthode de l’apprentissage de l’orthographe, « sans le secours du grec et du latin », c’est-à-dire sans recourir à l’étymologie ; cette méthode, affirme Blanc, est plus simple que celles qui sont habituellement mise en œuvre dans les écoles ; elle est efficace car il s’agit d’un « travail fait avec plaisir » ; elle utilise « l’émulation […] un puissant ressort qui anime et exalte les concurrents ; il faut savoir le mettre en jeu. Ces luttes pacifiques sont en général du goût des jeunes gens, et elles deviennent pour eux un véritable amusement » [6].
Dans ses derniers jours, « aveugle et paraplégique », il bénéficie des soins prodigués par sa soeur Émilie, également fouriériste [7].

Charbonnier, rédacteur à La Gazette des tribunaux, prononce le 2 février 1865 sur la tombe de Julien Blanc, qui vient de décéder, une vibrante oraison funèbre. Il insiste sur sa modestie, son dévouement, son esprit de sacrifice. Il évoque en particulier le rôle à la fois effacé et décisif qu’il jouait à La Démocratie pacifique : « grammairien, littérateur et logicien, il était, pour ainsi dire, le censeur de la rédaction. [...] C’est lui qui disciplinait la syntaxe et la fougue de style de tous ces publicistes improvisés qui écrivaient avec l’épée d’officier d’artillerie, le pinceau du peintre ou le crayon de l’architecte. »


Aphorisme du jour :
Les sectes suffisent à elles seules à guider la politique humaine dans le labyrinthe des passions
puceContact puceMentions légales puceEspace privé puce RSS

1990-2024 © charlesfourier.fr - Tous droits réservés
Haut de page
Réalisé sous SPIP
Habillage ESCAL 5.0.5