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Ils reviennent parfois
Charles Fourier à Radio Cité 103
Article mis en ligne le 12 mars 2006
dernière modification le 1er mai 2007

par Pisauri, Nazzareno, Verna, Viviana

Ils reviennent parfois

En direct du passé, ectoplasmes illustres, faits, méfaits et provocations

Propos librement extraits, avec l’autorisation de l’auteur, de l’essai de Roberto Massari : Charles Fourier et l’utopie sociétaire, Rome, 1989

Par Nazzareno Pisauri et Viviana Verna

En exclusivité pour Radio Cité 103, le fameux utopiste français Charles Fourier nous explique sa conception du monde, ses idées et ses luttes pour réaliser l’harmonie sociale.

Question. Bienvenue, Maître. Parlez-nous de l’harmonie sociale. Pourquoi est-elle si importante, d’après vous ?

Réponse. Elle est importante parce que c’est la seule voie pour parvenir à la félicité humaine. Il n’y a pas d’autre solution. Pensez qu’encore à mon époque, ou bien tu cherchais la félicité dans la religion, ou bien tu la cherchais dans la politique : en somme ou avec le Pape ou avec Robespierre. Mais moi je sentais que c’était faux, aussi faux dans un cas que dans l’autre.

Q. Faux, dites vous... Et pourtant, vers vingt ans, vous avez participé aux événements de la Révolution française. Ensuite vous l’avez regretté, n’est-ce pas ?

R. Attention, ne me parlez pas de la Révolution, j’ai failli y laisser ma peau, le saviez-vous ? Avec les jacobins devenus fous, la terreur, la guillotine... Ils disaient que j’étais un girondin, que j’étais trop modéré, que je trahissais même les principes de la Révolution. Les accusations les plus infamantes en somme. Ce fut un véritable lynchage.

Q. Vous, un modéré ? Un traître ? Mais vous étiez d’accord avec la devise Liberté, Egalité, Fraternité...

R. Mais sans aucun doute, ces trois mots sont la meilleure synthèse de mon Harmonie sociétaire. Tout ce que moi et mes disciples avons dit, avons écrit, avons fait était en vue de rendre ces mots vrais pour tous. Mais faites bien attention : nos idées étaient des idées neuves, des exemples concrets, ce n’étaient là ni les fanfaronnades de la politicaillerie ni les intrigues de la Convention nationale !

Q. D’accord, mais je vous en prie, Maître, ne vous mettez pas en colère... Veuillez pardonner notre ignorance. Et pour commencer, d’où provenaient vos idées ? Des philosophes des Lumières, des encyclopédistes, ou de qui encore ?

R. Sachez donc qu’elles provenaient de ma tête. De ce que j’ai vu et éprouvé en personne. Lisez, lisez donc ces lignes de mon livre Le Nouveau Monde industriel et sociétaire.

« La civilisation occupe en échelle du mouvement un rôle important, car c’est elle qui crée le ressorts nécessaires pour s’acheminer à l’association ; elle crée la grande industrie, les hautes sciences et les beaux arts. On devait faire usage de ces moyens pour s’élever plus haut en échelle sociale ne pas croupir à perpétuité dans cet abîme de misères et de ridicules nommé civilisation, qui, avec ses prouesses industrielles et ses torrents de fausses lumières, ne sait pas garantir au peuple du travail et du pain ». (p. 9).

Q. Bon, ce sont là vraiment des paroles fortes... On dirait des paroles de Marx...

R. Mais qu’est-ce que vous dites ! Je les ai écrites et publiées en 1829, quand votre Marx avait à peine dix ans. Mais savez-vous plutôt quelle est la vérité ? La vérité c’est que tous, tous ceux qui sont venus après moi, m’ont copié !

Q. Vraiment ? Tout le monde vous a copié ? J’en reste sans voix... Faites-nous quelque exemple.

R. Sachez que je peux vous en faire autant que vous voudrez. Marx et son ami Engels, par exemple, ont écrit dans leur Manifeste que « le libre développement de chacun est condition du libre développement de tous ». N’est-ce pas ce que je disais déjà en 1816 ? Et encore, je le disais mieux qu’eux ! Lisez, lisez encore ceci :

« On a si bien reconnu ce cercle vicieux de l’industrie, que de toutes parts on commence à la suspecter, et s’étonner que la pauvreté naisse en civilisation de l’abondance même [...] C’est ainsi qu’en industrie civilisée tout individu est en guerre intentionnelle avec la masse ; effet nécessaire de l’industrie anti-sociétaire ou monde à rebours. On verra disparaître ce ridicule dans le régime sociétaire, où chaque individu ne peut trouver son avantage que dans celui de la masse entière [...] Alors le plus pauvre des hommes aura beaucoup plus de jouissances que n’en a aujourd’hui le plus opulent monarque, parce que l’ordre, nommé Séries passionnées, crée les concerts sociaux ou plaisirs de l’âme, qui aujourd’hui sont à peu près inconnus des grands, et il élève les raffinements sensuels à une perfection dont le monde civilisé ne peut se former aucune idée ». (ibid., p. 34-36).
« Les plaisirs civilisés ne sont toujours que des fonctions improductives, tandis que l’état sociétaire applique la variété de plaisirs aux travaux devenus attrayants ». (ibid., p. 67).

Q. Mais comment ? Les travaux attrayants ? Alors, Maître, votre pensée a influencé aussi Freud. Parce que Freud a écrit qu’un travail, s’il est librement choisi, procure un plaisir particulier et qu’il est possible de reporter sur ce même travail et sur les rapports humains qui en dérivent de nombreuses composantes érotiques.

R. Mais oui, mais oui, c’est certain, Freud aussi a copié mes livres ! Sans rien y comprendre, c’est évident. Et comment aurait-il pu comprendre, un homme comme lui, qui n’avait jamais travaillé. Pendant toute sa vie il n’a rien fait d’autre que bavarder avec les dames de la bonne société viennoise !

Q. Allons, ne soyez pas injuste avec Freud, ce titan ! Qui donc plus que lui a libéré des brumes de la religion et de l’idéologie ? Et puis au fond Freud a écrit des livres, comme vous ! Et vous, qu’avez-vous fait d’autre ?

R. Ce que j’ai fait d’autre ? Mais j’ai travaillé ! J’ai travaillé, et comment, et ceci dès l’âge de seize ans. J’ai travaillé dans le commerce, en banque... J’ai travaillé à Lyon, à Rouen et à Paris. J’ai fait les pires travaux et j’ai vu toutes les scélératesses de ce que nous appelons notre civilisation. Naturellement j’ai dénoncé tout ça dans mes livres. Mais vous, vous les avez lus, ou êtes-vous venu m’interviewer sans rien en savoir, comme vous faites d’habitude, vous autres journalistes ?

Q. Ah ! Non ! Excusez-moi, Maître, je les ai lus, je les ai tous lus ! Voyons, je vais vous le démontrer. Si vous n’avez rien contre, je vais vous en lire les quelques passages qui m’ont le plus frappé.

« L’industrialisme est la plus récente de nos chimères scientifiques ; c’est la manie de produire confusément, sans aucune méthode en rétribution proportionnelle, sans aucune garantie pour tel producteur ou salarié de participer à l’accroissement de richesse. » (ibid., p. 28).

« Voilà le vol sublime de l’industrie vers la perfectibilité ; et cependant chaque année voit éclore une douzaine de philosophies nouvelles sur la richesse des nations : que de richesses dans les livres, que de misère dans les chaumières ! » (ibid., p, 30).

« Tout l’argent est concentré dans le commerce, vampire qui pompe le sang du corps industriel, et réduit la classe productive à se livrer à l’usurier. » (ibid., p. 395).

Alors ? Mon choix est-il bon ?

R. Je le savais. Vous vous êtes laissé séduire par les descriptions littéraires. D’ailleurs tout le monde disait que j’écrivais bien ! Mais naturellement le point essentiel vous a échappé ! Le point essentiel est que dans cette fausse industrie ce sont justement ceux qui travaillent qui sont seuls à y perdre. Le mécanisme de production des biens de consommation fonctionne à rebours : ceux-là même qui produisent ces biens sont exclus de leur consommation. Voilà bien le point essentiel, comment faites-vous pour ne pas le comprendre ?

Q. Mais veuillez m’excuser, il me semble que vous ne faites pas de distinction entre les patrons des fabriques et les ouvriers qui y travaillent. Vous les appelez tous des producteurs ! Alors que c’est ici la différence, la contradiction principale, ne croyez-vous pas ? Les patrons des industries traitent les travailleurs de la même manière que des marchandises et c’est si vrai qu’ils n’ont aucun scrupule à les licencier ni à les laisser dans la plus noire misère avec des salaires de famine.

R. Et vous auriez lu mes livres ! Savez-vous que vous avez un beau toupet ? Je vous jure que si vous n’étiez pas une femme, je vous planterais là.

Q. Et chevaleresque par-dessus le marché ! Vous ne cesserez jamais de m’étonner.

R. Et vous, finissez de dire des sottises ! Et des mensonges ! Il est évident que vous n’avez pas lu Le Nouveau Monde Amoureux, sinon vous auriez compris qu’il ne s’agissait pas de ma part des mignardises d’un damoiseau mais bien au contraire de reconnaître la primauté des femmes, dans l’édification de la société.

Q. Ma foi, en effet je n’ai pas lu Le Nouveau Monde Amoureux, c’est un titre que je n’ai pas trouvé dans les premières éditions de vos œuvres.

R. Mais oui, c’est vrai. Quel étourdi je suis ! C’est le livre que mes élèves bigots ont tenu caché. Toute la faute en revient à Considerant (et dire que je le prenais pour mon meilleur disciple !) Toutefois je sais que le livre a été redécouvert et oublié à l’aube du Mai français.

Q. C’est que moi, en 68, je n’était pas encore née, mais, Maître, je chercherai le livre dans une bibliothèque. Je vous promets que je le lirai. Mais que dites-vous dans ce livre à propos des femmes ? Vous n’aurez pas aussi découvert la différence de genre, hein ?

R. Je ne comprends pas de quoi vous parlez, savez-vous ? Je dis seulement que dans ma société harmonieuse, le rôle fondamental est assigné aux femmes. Dans la pratique la mécanique des passions, qui anime toute la vie sociale, est du domaine prévalent de la femme, qui est pour moi le sujet révolutionnaire principal.

Q. La femme en tant que sujet principal de la révolution... Mince alors ! Et comment se fait-il que personne ne se soit aperçu de cette reconnaissance de la qualité de la femme, même pas les féministes ?

R. Parce que mes travaux et mes idées ont été réquisitionnés par les politiciens et les prêtres, qui ont tout dénaturé et ont tout fait pour perdre ma réputation. Pensez donc que quand mon premier phalanstère était déjà construit et commençait à fonctionner, ils se sont mis à dire qu’il était immoral, un vrai repaire de malfaiteurs et pire encore. Je vous l’ai déjà dit, mes propres disciples cachaient et épuraient mes textes parce qu’ils en avaient honte vis-à-vis des bien-pensants. Et c’est ainsi que petit à petit est montée une marée de calomnies qui, à la fin, m’a submergé.

Q. Mais de quoi vous accusait-on, en réalité ?

R. Sachez-le bien, les prêtres dénonçaient avant tout la liberté sexuelle de notre communauté. Ils le faisaient aussi parce que la sexualité avait pour moi une véritable fonction sociétaire, tout comme la musique, la nourriture et l’hygiène. Rendez-vous compte que dans le projet de phalanstère il y avait même un service d’assistance sexuelle pour les personnes âgées !

Q. L’assistance sexuelle pour les personnes âgées... Ma foi, je peux comprendre les prêtres, hein ! Mais ceux que vous appelez les politiciens, de quoi vous accusaient-ils ?

R. Ceux-là aussi désapprouvaient souvent les comportements sexuels, l’éclatement des familles et autres bagatelles du même genre. Mais tout ça n’était que propagande. Le sexe n’y avait rien à voir : moi j’en comprenais l’importance mais eux s’en servaient à leurs propres fins, un point c’est tout. Mais ce qui, au contraire, leur flanquait vraiment la trouille c’était l’abolition du travail salarié. Voilà le hic ! Et c’est sur ce point que tous ces révolutionnaires à la noix devenaient fous furieux. Tandis que pour moi, justement en cohérence avec les principes de 89, c’était un point auquel on ne pouvait renoncer. Et ça au moins vous l’aurez lu dans mes livres, n’est-ce pas ?

Q. Oui, Maître, oui, je l’ai lu, je l’ai lu... Voyons si au moins sur ce sujet j’ai perçu les points essentiels. Vous écrivez :

« Il faudra que l’industrie sociétaire, pour devenir attrayante, remplisse les sept conditions suivantes :

1°. Que chaque travailleur soit associé, rétribué par dividende et non pas salarié.

2°. Que chacun homme, femme ou enfant, soit rétribué en proportion des trois facultés, capital, travail et talent.

3°. Que les séances industrielles soient variées environ huit fois par jour, l’enthousiasme ne pouvant se soutenir plus d’une heure et demie ou deux heures dans l’exercice d’une fonction agricole ou manufacturière.

4°. Qu’elles soient exercées avec des compagnies d’amis spontanément réunis, intrigués et stimulés par des rivalités très-actives.

5°. Que les ateliers et cultures présentent à l’ouvrier les appâts de l’élégance et la propreté.

6°. Que la division du travail soit portée au suprême degré, afin d’affecter chaque sexe et chaque âge aux fonctions qui lui sont convenables.

7°. Que dans cette distribution chacun, homme, femme ou enfant, jouisse pleinement du droit au travail ou droit d’intervenir dans tous les temps à telle branche de travail qu’il lui conviendra de choisir, sauf à justifier de probité et aptitude.

Enfin, que le peuple jouisse dans ce nouvel ordre, d’une garantie de bien-être, d’un minimum suffisant pour le temps présent et à venir, et que cette garantie le délivre de toute inquiétude pour lui et les siens (Théorie de l’Unité universelle, II, p. 14-15). »

Alors, Maître ? Ai-je, cette fois, bien choisi les passages ?

R. Oh ! Finalement, était-ce si difficile ? Ce sont justement ces idées que j’ai cherché à réaliser. Songez que j’ai dessiné de mes propres mains le plan et l’architecture du phalanstère. J’ai étudié les passions humaines, je les ai analysées dans leurs dynamiques sérielles, je les ai démontées et remontées pour comprendre le flux et le reflux de la haine et de l’amour. C’est ainsi que j’ai perçu les lois scientifiques de l’attraction sociale.

Q. Je voudrais aussi vous rappeler un autre passage, qui m’a semblé, comment dire ?... même prophétique. Vous avez écrit sur le chômage et la misère entraînés par un simple changement dans la mode... aux Etats-Unis, et vous avez ajouté que notre industrialisme n’est qu’un colosse aux pieds d’argile (La Fausse industrie, IX, 799)

R. La globalisation ? Et pourquoi pas ? Songez qu’en 1804, j’ai tenté de faire parvenir mon projet à Napoléon et que je me suis adressé à lui en lui donnant le titre d’Empereur du Globe. D’autre part, ce n’était pas difficile : avec le développement de la fausse industrie et avec le commerce parasitique qui envahissaient le monde entier, on comprenait déjà alors où cela nous mènerait.

Q. Mais alors, Maître, excusez si je me permets... alors vous êtes des nôtres ! Pourquoi ne donnez-vous pas un conseil aux jeunes qui disent non à la globalisation ? D’après moi les jeunes devraient connaître vos idées. Ce sont des idées extraordinaires, vraiment ! C’est un grand enseignement...

R. Ah, les jeunes ! Si vous saviez comment je les ai aimés...

Q. Alors allez-y, du courage ! Si vous avez aimé la jeunesse, dites-lui que... qu’un autre monde est possible !

R. Non, non, c’est vous qui devez leur dire ça pour moi. Dites-leur que Fourier a combattu pour construire un autre monde possible. J’ai déjà échoué une fois... il vaut mieux que je me taise.

Q. Mais... Maître, pourquoi parler ainsi maintenant ?

R. Mais qui, d’après vous, écouterait un vieil homme fatigué... un raté... Sachez plutôt ce que je vous demande, à vous qui êtes si capable, si jeune... Continuez à me lire quelques pages de mes livres. Laissez-moi l’illusion de vous avoir un peu séduite avec mes vieilles paroles.

Q. Séduite, et comment ! Maître, vous m’avez vraiment convaincue ! Et plus encore... Vous êtes l’homme le plus... le plus harmonieux de tous ceux que j’ai connus !

R. Vous exagérez ! Avant vous m’agressiez, maintenant vous me flattez...

Q. Mais non, croyez-moi, je le pense vraiment...

R. Vous voyez ? Il a suffit d’un tout petit peu de séduction pour créer une harmonie entre nous deux... Mais lisez, je vous en prie, lisez donc,

Q. Oui, je vous lirai encore quelques autres passages. Mais maintenant c’est à vous de choisir la musique qui à la radio accompagnera vos paroles. Quel est votre compositeur préféré ?

R. J’ai beaucoup aimé vos Cherubini et Rossini, puis Chopin, le Polonais qui avait conquis Paris. Mais surtout j’ai été ensorcelé par Mozart, le confrère viennois, et par Beethoven, cet Allemand incroyable, quelqu’un qui était peut-être plus fou et plus antipathique que moi. Comme moi il haïssait les nouveaux puissants de ce monde, les commerçants, les financiers bourgeois sans scrupules. Voilà, Mozart et Beethoven sont mes préférés.

Q. Le voilà, Beethoven... Mais vous, Beethoven, l’avez-vous connu ?

R. Non, je n’ai connu que sa musique. Mais je pense que lui aussi avait été séduit par Napoléon. Puis il s’est repenti. Il l’a alors accusé d’avoir substitué la tyrannie à la liberté. Beethoven a même tenté de détruire les partitions d’un concert qu’étant jeune il avait dédié à l’Empereur...

Q. Alors on peut dire qu’avec Beethoven vous aussi avez subi les effets de la dynamique des passions ?

R. La dynamique des passions, ma chère, affecte tous les hommes et elle les affecte à distance de temps et d’espace. Elle agit par attraction et par opposition.

Q. Aidez-moi à comprendre ; nous en sommes à l’exemple concret de votre attraction pour Beethoven, il y aura bien eu un motif, un mécanisme...

R. Euh ! c’est bien vite dit... Pendant toute sa vie il a été le chantre de l’harmonie universelle. Et puis, comment dire... Beethoven était un génie. Songez qu’il avait même inventé le ragtime en 1827 ! Si vous dites ça à ses jeunes amis qui disent non à la globalisation... vous verrez qu’ils n’y croiront pas !

Q. C’est merveilleux... c’était un génie ! C’était un génie, comme vous...

R. Un génie comme moi, enfin oui. Je vous vois un peu étonnée... Ça peut se dire, n’est-ce pas ? Quel mal y a-t-il ?

Q. Aucun, aucun... Certes on peut le dire ! J’étais seulement éblouie par Votre modestie.

R, Mais maintenant finissons-en avec les flatteries. Remettez-vous à lire.

Q. Une question encore. Pourquoi avez-vous appelé Mozart un confrère ? Est-ce que ça veut dire que ce qu’on disait de vous était vrai... Est-ce vrai que vous aviez adhéré à la franc-maçonnerie ?

R. Je ne répondrai pas à cette question. Faites-moi plutôt écouter Mozart.

Q. Tiens, tiens ! pas mal du tout le confrère.

R. Eh ! Eh bien oui... Mais courage ! Confrontez encore mon génie avec celui de Beethoven et de Mozart...

Q. Je lis :

« L’éducation harmonienne, dans ses procédés, tend d’abord à faire éclore dès le plus bas âge les VOCATIONS D’INSTINCT, appliquer chaque individu aux diverses fonctions auxquelles la nature le destine, et dont il est détourné par la méthode civilisée, qui, d’ordinaire et sauf rares exceptions, emploie chacun à contre-sens de sa vocation ». (Théorie de l’Unité universelle, p. 3).

« L’amour est proscrit par nos préjugés qui, au contraire, s’accordent merveilleusement avec l’ambition ; elle n’est point criminelle dans l’ordre civilisé ; [...] Il n’en n’est pas de même en amour où la religion, la constitution et tant d’autres autorités défendent les liens amoureux et les placent au rang des crimes ; de là vient que l’amour en civilisation ne peut se développer en aucun sens [...] Nos constitutions ne veulent admettre qu’un genre en amour, que la monogamie. On ne peut pas faire régner exclusivement un seul genre, aussi la monogamie exclusive ou fidélité conjugale est-elle violée à chaque instant et il n’est bruit que l’adultère ». (Le Nouveau Monde Amoureux, p. 29-30).

« Lorsque le genre humain parvenu à l’harmonie sociale sera débarrassé de ses chimères sur le sort de l’autre vie, lorsqu’il saura que dans cette autre vie le bonheur des défunts est intimement lié au bonheur des vivants, qu’on n’est heureux dans l’autre monde qu’en raison de la félicité dont on jouit dans celui-ci, on ne s’attachera qu’à faire le bonheur du monde vivant pour assurer le bonheur du monde défunt. » (ibid., p. 118).