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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Chalmeton, Ferdinand (Jacques Marie Louis)
Article mis en ligne le 31 mai 2020
dernière modification le 30 mai 2020

par Desmars, Bernard

Né le 4 avril 1817 à Saint-Ambroix (Gard), décédé le 12 octobre 1903 à Nîmes (Gard). Ingénieur, administrateur-directeur de la compagnie houillère de Bessèges. Abonné à La Phalange.

Ferdinand Chalmeton est le fils d’un receveur de l’enregistrement. Orphelin dès l’âge de 4 ans, il est recueilli par son frère aîné, qui exerce la même profession que son père. Il commence ses études secondaires au collège communal d’Uzès, les prolonge au collège royal de Nîmes et les termine dans une institution parisienne.

Ferdinand Chalmeton (Gard. Dictionnaire biographique et album, 1904)

Il envisage un moment de devenir médecin, mais opte finalement pour l’industrie [1]. Il suit une formation à l’École des mines de Saint-Étienne. À sa sortie en 1839, il séjourne en Belgique pendant près d’un an afin d’y observer les techniques minières, en particulier du côté de Seraing et du Grand Hornu.

Au début des années 1840, il est un partisan de la théorie sociétaire, abonné à La Phalange [2]. Il se rappelle en 1891 « l’enthousiasme qu’avait éveillé dans [s]on âme, alors qu’[il] étai[t] jeune, les livres de Charles Fourier » [3].

En 1841, les propriétaires de la concession de Bessèges (Gard) l’appellent à la direction des mines afin d’en organiser l’exploitation de façon plus rationnelle et plus rentable. Malgré les faibles moyens dont il dispose, il transforme l’entreprise houillère en l’équipant de machines modernes – il invente lui-même avec un nommé Veillon un « système d’essieu avec ses échantignolles et avec roues mobiles sur les fusées, applicable à toute espèce de voiture, mais particulièrement aux wagons employés dans les mines » [4]. Il ouvre de nouveaux puits qui permettent l’augmentation de la production (elle passe de 40 000 tonnes de charbon en 1842 à 153 000 en 1853 et 570 000 en 1883) et trouve des débouchés auprès de sociétés métallurgiques et de compagnies de navigation. En 1847, la Société des mines de Bessèges acquiert des hauts-fourneaux installés dans le voisinage et Chalmeton en fait construire deux autres. Il obtient une concession de minerai de fer qu’il met en exploitation. Il établit une ligne de chemin de fer entre Bessèges et Alès, ouverte en 1857, puis rachetée par la compagnie Paris-Lyon-Marseille. Il fait édifier des logements pour la main d’œuvre – dont une cité ouvrière à Molières-sur-Cèze. Il fait construire un hôpital et organise un service médical et une caisse de secours pour les salariés.

En août 1848, il se marie avec Huberte de Croy. Il est fait chevalier de la Légion d’honneur en 1861. L’année suivante, il laisse la conduite de l’exploitation minière à l’ingénieur en chef Marsaut et installe le siège social de la compagnie à Nîmes, où il s’établit lui-même, se consacrant désormais à la direction commerciale. Il développe aussi les institutions sociales : des caisses de secours et de retraite, des pensions ou des indemnités en cas d’accident. Il occupe un siège d’administrateur à la Société des Aciéries de Firminy, à la Compagnie des produits chimique d’Alès et de la Camargue et à la société des mines de Mokta El Hadid (dans l’est de l’Algérie).

Il reste en relation avec l’École sociétaire. Au milieu des années 1860, François Barrier et Jean-Baptiste Noirot s’efforcent de réorganiser le mouvement fouriériste. Ils envisagent en 1866 la création d’un nouveau périodique et adressent à leurs condisciples un courrier dans lequel ils leur demandent de préciser l’aide qu’ils pourraient apporter à ce projet. Ferdinand Chalmeton indique qu’il est prêt à s’abonner et à prendre une action [5]. On ignore si, lorsque La Science sociale est effectivement lancée, en mars 1867, il honore cet engagement. Dans les années suivantes, il paraît surtout lié au catholicisme social.

En juin 1891, une fête est donnée pour les cinquante ans de l’arrivée de Chalmeton à la tête de la compagnie houillère de Bessèges. Le personnel lui offre un buste en marbre, tandis que le pape Léon XIII – qui vient de publier l’encyclique Rerum Novarum, sur la question sociale – lui fait remettre la croix de Saint-Grégoire le Grand. L’évêque de Nîmes, « Mgr Gilly, dont on sait le zèle pour la question ouvrière envisagée catholiquement », commente La Croix, y célèbre une messe, préside le banquet rassemblant les salariés et prononce « un beau discours sur la question ouvrière » [6].

Ferdinand Chalmeton rappelle lors de cette fête de 1891 son ancienne adhésion à la théorie de Fourier.

On a pu dire que j’avais été séduit par les généreuses chimères de ce penseur. Cela est vrai, j’ai espéré, j’espère encore l’amélioration de notre ordre social. Le temps est proche peut-être où l’accord se fera entre toutes les classes et où le travail, le talent, le capital recevront chacun une juste rémunération. C’est pour tâcher d’atteindre ce résultat que je suis resté cinquante ans à la tête de la Compagnie de Bessèges, et, si nos efforts n’ont pas complètement réussi, le succès déjà obtenu prouve que nous n’avons pas poursuivi un but chimérique [7].

Il pratique la participation des salariés aux bénéfices, dont les fouriéristes Jean Leclaire et Jean Baptiste André Godin ont été des pionniers. Cependant, on ne lui connaît aucune relation avec le mouvement fouriériste à partir des années 1870. Inspiré par le catholicisme social. Il fait « construire des églises et des écoles chrétiennes pour sa famille ouvrière » [8]. En 1901, une nouvelle fête – qui commence par une messe – est organisée à Bessèges pour les soixante années de présence de Chalmeton à la tête de l’entreprise [9].

La Croix consacre à Ferdinand Chalmeton une longue nécrologie, alors que l’organe fouriériste La Rénovation ne signale pas son décès. La municipalité de Bessèges attribue le nom de l’ancien directeur de la houillère à une de ses rues.