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Bourdon, Antoine (Marie)
Article mis en ligne le 8 décembre 2019

par Desmars, Bernard

Né le 6 novembre 1842 à Fleurie (Rhône), décédé le 4 juillet 1901 à Paris, 2e arrondissement (Seine). Graveur. Un des premiers membres de la section parisienne de l’Association Internationale du Travail (ou Première Internationale), coopérateur. Abonné à La Science sociale.

Antoine Bourdon naît au château de Poncié, propriété de la comtesse de Verdonnet dans la commune de Fleurye (aujourd’hui Fleurie) ; son père et sa mère, qui se sont mariés en 1839 à Paris, sont respectivement cocher et cuisinière de la famille de Verdonnet, à Poncié ainsi qu’à Paris. Au moment du mariage de leur fils, en 1872, ils sont concierges et demeurent rue Grenelle-Saint-Germain, où se situe la résidence du comte et de la comtesse de Verdonnet [1].

Membre de l’Association internationale du travail

Antoine Bourdon demeure rue Louis-le-Grand dans les années 1860 ; il exerce la profession de graveur (« graveur sur métaux » [2], ou « graveur d’armoiries » [3] selon les sources). Dans la seconde moitié de la décennie, il est actif au sein de l’Association Internationale du Travail (AIT) fondée à Londres en 1864 [4]. Il figure parmi les vingt membres qui animent le bureau parisien de l’AIT en 1865, et assure le secrétariat de rédaction de La Tribune ouvrière publiée sous la direction de Charles-Mathieu Limousin. Seuls quelques numéros paraissent avant que des poursuites judiciaires n’entraînent sa suppression. Ses dirigeants essaient de prolonger son existence en changeant son titre (La Presse ouvrière, puis La Fourmi) et son lieu d’impression (Bruxelles), mais à chaque fois, un seul numéro paraît.

Ce même bureau parisien envoie une délégation au premier congrès de l’AIT qui se tient à Genève en septembre 1866 ; les onze délégués, parmi lesquels figure Antoine Bourdon, aux côtés notamment de Benoît Malon et d’Eugène Varlin, y présentent un Mémoire dans lequel sont abordés les thèmes de la démocratie, des relations entre le capital et le travail, de l’instruction et de la coopération [5]. Dans ce Mémoire, Bourdon et Varlin se distinguent de leurs amis proudhoniens sur deux points : le travail des femmes et l’éducation. Alors que ces derniers considèrent que la place des femmes est au foyer, les deux « minoritaires » sont persuadés qu’il est impossible de supprimer le travail féminin, mais qu’il faut en améliorer les conditions. Ils souhaitent aussi que l’éducation des enfants soit prise en charge par la société, quand les « majoritaires » veulent la placer sous le contrôle du père de famille.

Après le congrès de Genève, le bureau parisien est réorganisé ; Bourdon y remplit les fonctions d’archiviste. Puis, en septembre 1867, après le congrès de Lausanne, l’équipe des responsables est renouvelée. Mais les poursuites engagées par les autorités impériales contre les nouveaux dirigeants entraînent en mars 1868 leur remplacement par une nouvelle commission (dite « deuxième commission ») dont les membres – parmi lesquels Bourdon, Varlin, Malon – sont eux-mêmes traduits en justice peu après : d’abord parce l’association n’est pas légalement autorisée, mais surtout parce que ses dirigeants ont soutenu efficacement un mouvement de grève à Genève en faveur duquel ils ont collecté de l’argent. Comme ses camarades, Bourdon est condamné en mai 1868 à trois mois de prison et 100 francs d’amende, la peine étant confirmée en appel en juin. Il subit sa condamnation à Sainte-Pélagie.

Fin 1868, comme Varlin, Combault et Malon, il accepte de collaborer à un hebdomadaire fondé à Genève, L’Égalité, périodique publié par la Fédération des sections romandes de l’Internationale.

À la veille des élections législatives de 1869, un certain nombre de militants ouvriers – dont Antoine Bourdon – déclarent que « le moment est venu où le parti démocratique et socialiste doit s’affirmer ». Ils publient un programme dans lequel ils proposent la « suppression des armées permanentes » et « l’armement de tous les citoyens » ; la « séparation de l’Église et de l’État » ; une réforme de la justice ; l’« instruction laïque et intégrale, obligatoire pour tous, et à la charge de la nation » ; les libertés de la presse, de réunion, d’association ; la suppression des impôts indirects et l’ « établissement de l’impôt progressif » ; la nationalisation des banques, assurances, chemins de fer et mines [6].

Coopérateur et fouriériste

Antoine Bourdon est aussi un militant de la coopération : il fait partie d’un comité d’initiative appelant en 1866 à la création d’« une Société civile de consommation dans le 6e arrondissement », comité qui comprend aussi Jules Vinçard et Benoît Malon ; d’après le projet de statuts, l’association a pour objectif la « vente aux associés de denrées alimentaires pures de tout mélange et non falsifiées ». Selon les informations fournies sur les membres du comité, Bourdon est déjà membre de la société civile d’épargne des ouvriers graveurs [7]. Il est aussi un des signataires en 1868 de l’acte constitutif de la société d’alimentation La Marmite – dont son ami Varlin est le principal animateur – qui a pour but « de fournir, au prix de revient, à tous les sociétaires, une nourriture saine et abondante à consommer sur place ou à emporter » [8].

Antoine Bourdon signale en 1866, par l’intermédiaire de son ami Émile Fromont, également graveur, son intention de s’abonner au périodique fouriériste que les dirigeants de l’École sociétaire prévoient de créer [9] ; quand La Science sociale paraît, en mars 1867, il s’y abonne ; mais un an plus tard, il explique à la direction du périodique qu’en raison de « circonstances particulières indépendantes de [sa] volonté », il ne peut se réabonner [10].

Désengagement militant

À la toute fin des années 1860, Bourdon semble s’éloigner du militantisme socialiste et coopérateur. On ne le voit pas prendre part à la Commune, ni, dans les décennies suivantes, aux activités du mouvement coopératif et de l’École sociétaire.

En 1872, il demeure rue de la Michodière et épouse Marie Joséphine Emélie Wittké, graveuse, dont le père est inconnu et dont la mère est décédée ; elle a pour tuteur Émile Fromont qui est lui-même fouriériste ainsi que son épouse, Marie-Madeleine Wittké (sœur de la mère de Marie Joséphine Emélie). Dans les annuaires des années 1880, Bourdon est mentionné comme successeur d’Émile Fromont, rue de Grammont (1880), puis rue Louvois (1884), dans le deuxième arrondissement [11].

En 1887, Benoît Malon, dans la Revue socialiste, parle de Bourdon au passé – alors qu’il est toujours vivant :

Bourdon était garantiste ou mieux fouriériste et comme tel il approuva Varlin dans sa campagne initiale pour l’égalité civique, politique et économique des femmes [12].

Le décès de Bourdon en 1901 – survenu en sa demeure rue Louvois – n’est pas mentionné dans la presse, qu’elle soit fouriériste, coopérative ou socialiste.