Né le 3 avril 1813 à Privas (Ardèche), décédé le 1er avril 1901 à Chaumont-en-Vexin (Oise). Négociant, rédacteur au Courrier du Havre, commissaire à l’émigration, directeur d’une compagnie d’assurances maritimes. Abonné à La Démocratie pacifique, souscripteur à la rente sociétaire et membre du groupe phalanstérien de Saint-Louis (Sénégal) de 1846 à 1848.
Stéphen Auxcousteaux est le fils d’un inspecteur des contributions directes. Dans la première moitié des années 1840, il est négociant au Havre ; il est en affaire avec un commerçant de Saint-Louis (Sénégal), Leleu [1]. En avril 1845, il quitte la métropole et s’installe à Saint-Louis. Tout en faisant du commerce, il s’intéresse au développement agricole du comptoir et de ses environs. Il rédige une note sur cette question, qu’il adresse au gouverneur en juillet 1846 ; l’année suivante, il demande la création d’un poste d’inspecteur des cultures [2]. Il rédige un mémoire, présenté en février 1848 au Conseil général du Sénégal, dans lequel il promeut le développement des activités agricoles [3].
Prosper Bancal, le correspondant de l’École sociétaire à Saint-Louis, mentionne son nom à plusieurs reprises, de 1846 à 1849. Auxcousteaux fait partie des « renteurs », qui s’engagent à verser régulièrement de l’argent au Centre sociétaire pour développer l’action de l’École. Il est abonné à La Démocratie pacifique [4]. Sans doute fait-il partie des six condisciples qui participent au banquet fouriériste organisé à Saint-Louis en avril 1847 [5]. « C’est un fidèle », déclare Bancal [6], qui le charge exceptionnellement de correspondre avec le Centre sociétaire [7].
En 1848, il entre en conflit avec son associé Leleu, dont il se sépare [8]. Il rentre au Havre à la fin de la même année. Sans doute passe-t-il au Centre parisien de l’École sociétaire ; en tout cas, il rencontre Victor Considerant, qui lui paraît souffrant, écrit-il ensuite à Bancal [9]. Cependant, il semble ensuite cesser toute participation au mouvement fouriériste.
Il continue à s’intéresser au Sénégal : collaborateur du Courrier du Havre, il se pose « en expert des affaires sénégalaises » et consacre plusieurs articles aux blocages qui entravent le développement du comptoir [10]. Il publie en 1851 Le Sénégal est une colonie française où il critique l’organisation du régime commercial et réclame des communications plus fréquentes et plus régulières avec la métropole. En février 1852, il est chargé par les négociants de Saint-Louis de remettre une note au ministre de la Marine [11]. Il se marie en 1853 avec Marie Chaptal, fille de Jean Baptiste Marie Chaptal, ancien député et petite-fille du chimiste Jean Antoine Chaptal. Il est alors rédacteur en chef du Courrier du Havre.
Au cours des années suivantes, il est commissaire à l’émigration au Havre. Il est admis en 1859 dans la Société havraise d’études diverses. Dans les années 1860, il dirige une compagnie d’assurances maritimes, La Persévérante, toujours dans la même ville. Il est le secrétaire général de l’Exposition maritime internationale qui se tient au Havre en 1868. Autour de 1870, il est aussi « homme de lettres ». Son épouse décède en 1871.
Il fait partie de l’Union de la paix sociale [12], une organisation fondée par les disciples de Frédéric Le Play dans les années 1870. Toujours intéressé par les questions coloniales, il adhère en 1877 à la Société des études coloniales et maritimes, à laquelle il envoie une Étude sur la création d’une société pour favoriser et protéger l’émigration française [13]. Peu après, il est impliqué dans une affaire qui le conduit devant les tribunaux. Un certain marquis de Rays projette, à partir de 1877, la création d’un établissement en Océanie, la « colonie libre de Port-Breton ». Grâce à une habile campagne (conférences, presse), il parvient à convaincre un certain nombre d’Européens d’y acquérir des terres et de s’y rendre ; plusieurs bureaux sont créés pour diffuser l’information et collecter l’argent, dont l’un, installé au Havre, est dirigé par Auxcousteaux. Au total, environ 9 millions de francs sont versés. Il s’agit d’une escroquerie – le marquis de Rays ne dispose pas réellement des terrains qu’il vend et les acquéreurs, transportés dans de très mauvaises conditions, arrivent sur un territoire impropre à la culture – qui a des conséquences dramatiques puisque de nombreux migrants décèdent. Douze prévenus sont traduits en 1883 devant le tribunal correctionnel ; Auxcousteaux dit avoir « été séduit par le but civilisateur et religieux de l’œuvre du marquis de Rays » et nie les irrégularités d’écritures qu’on lui reproche. Il est condamné à 6 mois de prison et 3 000 francs d’amende pour « escroquerie par aide et assistance » en première instance, mais il est acquitté en 1884 en appel. Il se retire ensuite dans l’Oise.
[1] Roger Pasquier, Le Sénégal au milieu du XIXe siècle. La crise économique et sociale, thèse pour le doctorat ès lettres, université Paris – Sorbonne (Paris IV), 1987, tome 2, p. 710-711.
[2] Ibid., tome 4, f. 1687.
[3] Ibid., tome 1, f.139, f. 287 et f.374
[4] Archives nationales, fonds Fourier et Considerant, 10 AS 36 (681 Mi 57, vues 225 et 229), lettres de Prosper Bancal au Centre sociétaire, 22 novembre 1846 et 27 octobre 1847.
[5] Archives nationales, fonds Fourier et Considerant, 10 AS 36 (681 Mi 57, vues 207-210), lettre de Prosper Bancal, 1er juin 1847.
[6] Archives nationales, fonds Fourier et Considerant, 10 AS 36 (681 Mi 57, vues 198-200), lettre de Prosper Bancal, 9 novembre 1848.
[7] Archives nationales, fonds Fourier et Considerant, 10 AS 36 (681 Mi 57, vues 211-212), lettre de Stéphen Auxcousteaux, non datée (sans doute de juillet 1847).
[8] Roger Pasquier, Le Sénégal…, op. cit., tome 2, f.710-711 et 805.
[9] Archives nationales, fonds Fourier et Considerant, 10 AS 36 (681 Mi 57, vue 220), lettre de Prosper Bancal à Victor Considerant, 26 mars 1849 (« Monsieur Auxcousteaux m’a dit vous avoir vu et que vous paraissiez souffrant ; soignez-vous bien, car la Cause et nous avons besoin de vous »).
[10] Roger Pasquier, Le Sénégal…, op. cit., tome 2, f. 710-711 et 817.
[11] Ibid., tome 2, f. 916
[12] L’Union de la paix sociale. Comité provisoire de Paris. Programme, déclaration et listes des membres, Tours, Mame, 1874, p. 24 ; La Réforme sociale, 6 janvier 1885, liste des membres ; Auxcousteaux est membre titulaire.
[13] Travail signalé dans le Bulletin de la Société des études coloniales et maritimes, n°1, mai 1876-mars 1877, p.22 et p. 27.
Œuvres :
Le Sénégal est une colonie française, Paris, Impr. P. Dupont, 1851, 40 p. + carte (en ligne sur Gallica).
Collaboration au Courrier du Havre dont il est rédacteur en chef au début des années 1850.
Sources :
Archives nationales, fonds Fourier et Considerant, 10 AS 36 (681 Mi 57, vues 198-200, 207-212, 220, 225 et 229), lettres de Prosper Bancal, 22 novembre 1846, 1er juin 1847, 27 octobre 1847, 9 novembre 1848 et 26 mars 1849 ; et une lettre non datée de Stéphen Auxcousteaux (sans doute juillet 1847).
Archives départementales de l’Ardèche, état civil de Privas, acte de naissance de Stéphen Auxcousteaux, 3 avril 1813 (en ligne sur le site des Archives départementales de l’Ardèche, vue 23/70).
Archives départementales de Seine-Maritime, état civil du Havre, acte de mariage du 28 juin 1853 (en ligne sur le site des Archives départementales de Seine-Maritime, vue 113/238).
Archives départementales de l’Oise, état civil de Chaumont-en-Vexin, acte de décès, 2 avril 1901 (en ligne sur le site des Archives de l’Oise, vue 369/466).
L’Union de la paix sociale. Comité provisoire de Paris. Programme, déclaration et listes des membres, Tours, Mame, 1874, 52 p.
La Réforme sociale, 6 janvier 1885.
Bulletin de la Société des études coloniales et maritimes, n°1, mai 1876-mars 1877.
Bibliographie :
Roger Pasquier, Le Sénégal au milieu du XIXe siècle. La crise économique et sociale, thèse pour le doctorat es lettres, sous la direction de Jean Ganiage, université Paris – Sorbonne (Paris IV), 1987, 5 tomes, 2397 p.
Daniel Raphalen, L’Odyssée de Port-Breton. Le rêve océanien du marquis de Rays, Rennes, Les Portes du Large, 2006, 288 p.
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