Jean-Claude Dubos |
HAHN Manfred : Archivalkunde des vormarxistischen Sozialismus (1995) Cahiers - 1995 / n° 6 - décembre 1995 article en texte intégral |
Né le 1er janvier 1842 à Paris, décédé le 9 mai 1913 à Bruxelles. Journaliste et publiciste. Rédacteur du compte rendu du banquet phalanstérien de 1865. Correspondant de fouriéristes dans les années 1870 et 1880.
Georges Barral est le fils de Jean-Augustin Barral, ingénieur et chimiste, auteur et directeur de publications scientifiques et agricoles, et rédacteur de La Démocratie pacifique dans les années 1840. Il fait des études de droit (il dit avoir suivi des « conférences juridiques » présidées par Gambetta, alors au terme de sa formation d’avocat) [1] ; il soutient en 1870 une thèse de droit sur le « louage d’ouvrage et d’industrie ». Mais il s’intéresse aux sciences ; il est qualifié de « chimiste » lors de son mariage en 1866 ; un dictionnaire le désigne comme « chimiste et physiologue » à la fin des années 1880 [2]. Ayant rencontré Claude Bernard (1813-1878) en 1865, il le fréquente régulièrement. Il s’en proclame l’ami et le disciple, le « confident de ses dernière pensées » et « un de ses légataires scientifiques » [3]. Il publie une pièce de théâtre du savant, Arthur de Bretagne.
Son père l’associe assez rapidement à ses travaux scientifiques menés dans son laboratoire, et surtout à ses publications ; en 1865, il est l’un des deux secrétaires de rédaction du Journal d’agriculture pratique, dont il tient la rubrique « Revue commerciale ». Il devient rapidement l’un des principaux rédacteurs de La Presse scientifique, la revue fondée par son père. Il donne aussi des articles à d’autres organes, comme L’Économiste français de Jules Duval. Parallèlement, il assure le secrétariat de la Société de navigation aérienne.
En 1866, Georges Barral se marie avec Marie Thérèse Mathilde Savalle, fille de l’ingénieur civil Savalle, décédé, et de Marie Thérèse Van Engelen qu’épouse Jean-Augustin Barral lors de la même cérémonie. Parmi les témoins des deux mariages, figurent les fouriéristes César Daly et Charles Pellarin.
Anniversaire fouriériste et relations épistolaires
Dans les années 1860, François Barrier s’efforce de reconstituer le mouvement fouriériste, très affaibli depuis la Seconde République ; en 1865, il essaie de rétablir la tradition des banquets phalanstériens ; Jean-Augustin Barral et son fils Georges y assistent tous les deux. Georges Barral rédige le compte rendu qui paraît dans La Presse scientifique. En réalité, l’essentiel consiste dans la reproduction d’un long texte envoyé par Charles Pellarin et de quelques toasts. Mais sa brève introduction exprime son adhésion à Fourier :
Non, maître, votre souvenir n’est pas mort.
Vous, que nous n’avons pas connu, mais que nos pères ont aimé pieusement, nous avons appris à honorer votre mémoire, et votre nom est inscrit dans nos jeunes cœurs en traits ineffaçables.
Vous aviez foi dans l’avenir et pleine espérance dans la jeunesse.
Vous avez bien fait.
[…] nous avons l’avenir, l’avenir qui n’est pas loin et qui nous appartient un peu à nous autres, qui avons les grands desseins de nos maîtres à réaliser.
Puis Georges Barral dit s’être « assis avec émotion au milieu des disciples et des amis de Charles Fourier » et souligne qu’après une période où l’Ecole semblait ensommeillée et la tradition des banquets interrompue,
il s’est trouvé quelques hommes qui, pris d’une nouvelle ardeur, demandent s’il ne faut pas enfin se réveiller. Leur sympathique appel a eu de l’écho. Chacun est accouru. Les mains se sont serrées avec une touchante cordialité et une douce effusion.Les esprits occupés des mêmes pensées ont communié de nouveau, saintement, paisiblement [4].
Pourtant, malgré ces propos, Georges Barral reste ensuite éloigné des activités de l’École ; un Barral est à nouveau présent au banquet du 7 avril 1866, sans que l’on sache s’il s’agit de Georges ou de son père Jean-Augustin. Leur présence n’est plus mentionnée lors des banquets suivants. Et Georges, pas plus que son père, ne participe à la rédaction des organes fouriéristes (La Science sociale, puis le Bulletin du mouvement social, la Revue du mouvement social), ni n’apporte sa contribution financière afin de maintenir l’existence de la Librairie des sciences sociales ; il n’apparaît pas non plus parmi les souscripteurs des différentes entreprises phalanstériennes qui subsistent ou qui apparaissent, des années 1860 aux années 1880.
Toutefois, Georges Barral conserve au moins dans les années 1870 et 1880 des relations avec certains disciples de Fourier (Victor Considerant, Eugène Bonnemère, le couple Gagneur), relations dont témoignent les lettres conservées aux Archives et Musée de la Littérature à Bruxelles.
Cet intérêt persistant pour le fouriérisme et ces liens maintenus avec quelques disciples phalanstériens se manifestent aussi dans Le Journal-Barral, revue publiée de 1885 à 1888 dont il est le rédacteur en chef, dont son frère Jacques est le gérant. Dans ce périodique d’abord trimensuel (il paraît les 10, 20 et 30 de chaque mois), puis bimensuel (le 5 et le 20), Georges Barral aborde le « mouvement agricole, artistique, colonial, commercial, économique, financier, industriel, littéraire, philosophique, scientifique » avec de nombreuses illustrations. Plusieurs notices biographiques de fouriéristes, accompagnées de portraits, paraissent sous sa plume : Allyre Bureau, Just Muiron ; il envoie à Victor Considerant celui consacré à Allyre Bureau et reçoit une lettre de remerciement de l’ancien chef de l’École [5]. Il accueille aussi dans Le Journal-Barral des lettres du fouriériste Granday, concernant l’agriculture et la météorologie, et surtout des articles de Jouanne, le fondateur de la Maison rurale d’expérimentation sociétaire à Ry (Seine-Inférieure) sur « le travail attrayant ». Enfin, en 1888, Barral consacre un article à « la théorie sociétaire de Charles Fourier » [6].
Ecriture et édition
Dans ce même Journal-Barral, il consacre de nombreux articles aux techniques agricoles, à la navigation aérienne et aux sciences naturelles, ce qui lui permet de rendre hommage à son père ainsi qu’à son maître Claude Bernard. Il reproduit dans son périodique la thèse de Joseph Girard, Contribution à l’étude de la fécondation artificielle, présentée en 1885 à la Sorbonne, mais refusée par la Faculté [7].
Georges Barral est un auteur très prolifique, dans des genres très différents : la science, la poésie, les récits (par exemple de sa rencontre en 1864 avec Baudelaire, à qui il sert de guide à Bruxelles), les biographies, la publication de textes de Napoléon 1er, le Missel de l’amour sentimental, etc. Il est mentionné parmi les collaborateurs du second supplément au Grand Dictionnaire universel de Pierre Larousse [8].
Au tournant du XIXe et du XXe siècle, il dirige une collection, « Poètes français de l’étranger » chez l’éditeur Fischbacher. Il y publie notamment les poètes belges Iwan Gilkin et Valère Gille. Peut-être est-il déjà installé en Belgique, où il décède en 1913.
[1] Barral dans sa présentation des Napoléon I (1769-1821), empereur des Français. Allocutions et proclamations militaires publiées pour la première fois d’après les documents authentiques, Paris, Flammarion, 1896, p. VII.
[2] A. de Gubernatis, Dictionnaire international des écrivains du jour, Florence, Louis Niccolai, 1891, tome 1, p. 175
[3] Georges Barral, « Préface » à Albert Tartenson, Traité clinique des fièvres larvées (fièvres de marais), Paris, Félix Alcan, 1888, p. 9-37 ; et « Préface historique » à Claude Bernard, Arthur de Bretagne : drame inédit en cinq actes et en prose, avec un chant, Paris, Dentu, 1887, 193 p., VII-XXIV p.
[4] Georges Barral, Le 93e anniversaire natal de Charles Fourier, Paris, Librairie des sciences sociales, 1865, p. 3-4.
[5] Archives et Musée de la Littérature (AML), Bibliothèque royale Albert 1er (Bruxelles, Belgique), ML 3733, lettre de Victor Considerant à Georges Barral, 16 novembre 1885. Victor Considerant commence par « mon cher Georges » et tutoie son correspondant.
[6] Journal-Barral, n°19, 20 août 1888.
[7] « Fécondation », Grand Dictionnaire universel, Paris, 1890, tome XVII, 2e supplément, p. 1237.
[8] « Au lecteur », Grand Dictionnaire universel, Paris, 1890, tome XVII, 2e supplément, p. 2023. Georges Barral fait partie de ceux qui n’ont « apporté qu’un nombre restreint d’articles sur des sujets variés ».
Œuvres :
Salon de 1864. Vingt-sept pages d’arrêt !!!, Paris, imp. de Dubuisson, 1864 (2e éd.), 40 p. (extrait de la Presse scientifique des deux mondes).
Essai sur la culture de la canne à sucre, par M. Alvaro Reynoso. Résumés critiques (avec MM. Bobierre et Girard), Paris, E. Giraud, 1865, 26 p.
Le 93e anniversaire natal de Charles Fourier, Paris, Librairie des sciences sociales, 1865, 14 p. (extrait de la Presse scientifique des deux mondes, 1865).
Impressions aériennes d’un compagnon de Nadar, suivies de la note lue à l’Observatoire impérial sur la 3ème ascension du Géant, avec une carte du voyage, Paris, Mme Gaut, 1865, 20 p., pl.
Du louage d’ouvrage et d’industrie, Thèse de licence de droit, Paris, 8 juin 1870, Paris, impr. Cusset, 1870, 70 p.
Napoléon I (1769-1821), empereur des Français. Allocutions et proclamations militaires publiées pour la première fois d’après les documents authentiques (publiée par Georges Barral), Paris, Flammarion, 1896, 252 p. (en ligne sur Gallica).
Bréviaire de l’amour expérimental. Méditation sur le mariage selon la physiologie du genre humain, du Docteur Jules Guyot, publié avec un discours préliminaire, une notice biographique et un lexique par Georges Barral et Ch. Dufaure de la Prade, Paris, Marpon et Flammarion, et Librairie physiologique, 1882 (réédité en 1885), 181 p.
Le Travail. Revue encyclopédique illustrée, 1883-1885, 3 volumes.
Le Livre de l’épouse. Missel de l’amour sentimental, Paris, C. Marpon et E. Flammarion, 1884, 221 p.
Claude Bernard, Verviers, Bibliothèque Gilon. Galerie scientifique, 1889, 123 p.
Histoire des sciences sous Napoléon Bonaparte, Paris, A. Savine, 1889, IX-290 p. (en ligne sur Gallica).
Histoire populaire des 72 savants dont les noms sont inscrits sur la grande frise de la tour Eiffel (avec Jacques Barral), Paris, J. Mersch, 1889, 146 p., portraits.
Lazare Carnot, d’après un témoin de sa vie et des documents nouveaux, Verviers, E. Gilon, 1890, 144 p.
Lazare Carnot, d’après deux témoins de sa vie et des documents nouveaux, Paris et Verviers, E. Gilon, 1891 (nouvelle édition, revue et augmentée d’une lettre de M. Ad. Carnot et d’un portrait), 152 p.
Histoire d’un inventeur. Exposé des découvertes et des travaux de M. Gustave Trouvé dans le domaine de l’électricité, Paris, G. Carré, 1891, XVI-610 p., portrait et fig.
La Connaissance de la mer, notions populaires et positives sur les phénomènes maritimes et sur les richesses marines du globe terrestre, Verviers, E. Gilon, et Paris, Fischbacher, 1892, 586 p.
Le Panthéon scientifique de la tour Eiffel. Histoire des origines, de la construction et des applications de la tour de 300 mètres, biographie de ses créateurs, exposé de la vie et des découvertes des 72 savants dont les noms sont inscrits sur la grande frise extérieure, Paris, A. Savine, 1892, 508 p., fig., portraits (en ligne sur Gallica).
L’Epopée de Waterloo, narration nouvelle des Cent-jours et de la campagne de Belgique en 1815, composée d’après les documents inédits et les souvenirs de mes deux grands-pères, officiers de la grande armée, combattants de Waterloo, Paris, E. Flammarion, 1895, 328 p.
Nouvelles découvertes en électricité : histoire d’un inventeur, les moteurs électriques […], Paris, Librairie centrale des sciences, 1895, XVI-610 p.
Itinéraire illustré de l’épopée de Waterloo. Guide historique et militaire du champ de bataille, Paris, E. Flammarion, 1896, 165 p., diagrammes de G. Barral et 60 dessins originaux d’Adolphe Hamesse (en ligne sur Gallica).
Messages et discours politiques [de Napoléon 1er], publiés pour la première fois d’après des textes authentiques, Paris, E. Flammarion, 1896, 254 p., portrait.
Les Frances littéraires de l’étranger, Paris, Fischbacher, 1900 (nouvelle édition), XLIV p.
Cinq journées avec Charles Baudelaire, propos recueillis à Bruxelles par Georges Barral, et publiés par Maurice Kunel, Liège, Vigie 30, 1932, 128 p. (réédition, Sens, Obsidiane, 1995, 99 p.)
Georges Barral est aussi le collaborateur de nombreuses revues : Journal d’agriculture pratique, Journal de l’agriculture, Presse scientifique des deux mondes. Il est le rédacteur en chef du Journal-Barral qu’il fonde avec son frère Jacques et qui paraît de 1885 à 1888.
Il écrit des préfaces, parfois très importantes, pour plusieurs ouvrages :
« Préface » à Frédéric Gilbert (ou Yveling Ram Baud) et Jean-Louis Dubut de Laforest, Le Faiseur d’hommes, Paris, C. Marpon et E. Flammarion, 1884, XXXI-309 p. (en ligne sur Gallica).
« Préface historique » à Claude Bernard, Arthur de Bretagne : drame inédit en cinq actes et en prose, avec un chant, Paris, Dentu, 1887, 193 p. (en ligne sur Gallica).
« Préface » à Albert Tartenson, Traité clinique des fièvres larvées (fièvres de marais), Paris, Félix Alcan, 1888, p. 9-37 (en ligne sur Gallica).
« Préface » à Oruno Lara, Sous le ciel bleu de la Guadeloupe, Paris, Fischbacher, 1912, 175 p., portrait.
Mme Claire Louis-Bosch, Moissons russes. Pultawa. Heures de Russie. Brises de France. Considérations sur la Russie et les Russes, avec une présentation de Mme Claire Louis-Bosch par Georges Barral, Paris, Fischbacher, 1910, XLVII-164 p.
Sources :
Archives et Musée de la Littérature (AML), Bibliothèque royale Albert 1er (Bruxelles, Belgique), ML 3732-3736, lettres adressées à Georges Barral ou à son père Jean-Augustin.
Archives de la Nièvre, 82 J 485, fonds Achille Millien, deux lettres et deux cartes postales de Georges Barral, « poète » à Bruxelles.
Archives de Paris, état civil du 10e arrondissement, acte de mariage du 4 juin 1866 (en ligne sur le site des Archives de Paris, vue 2/31).
A. de Gubernatis, Dictionnaire international des écrivains du jour, Florence, Louis Niccolai, 1891, tome 1 (en ligne sur Gallica).
Grand Dictionnaire universel, Paris, 1890, tome XVII, 2e supplément.
Bibliographie :
Jean Fornasiero, « Réflexions sur le cas de Jean-Augustin Barral », Cahiers Charles Fourier, n°9, 1998, p. 55-66.
Jean Fornasiero, « Au nom du père : une lettre d’Emile Zola à Georges Barral », Cahiers naturalistes, n°73, 1999, p.53-60.
Dictionnaire de biographie française, Paris, Librairie Letouzey et Ané, 1951, tome V, colonne 542.
Jean-Claude Dubos |
HAHN Manfred : Archivalkunde des vormarxistischen Sozialismus (1995) Cahiers - 1995 / n° 6 - décembre 1995 article en texte intégral |
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