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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Hache, Norbert (Irénée)
Article mis en ligne le 28 juin 2014
dernière modification le 14 août 2014

par Desmars, Bernard

Né le 26 mars 1810 à Sainte-Austreberthe (Pas-de-Calais), décédé le 29 octobre 1900 à Paris (Seine). Médecin. Maire de L’Haÿ (alors dans le département de la Seine, aujourd’hui L’Haÿ-les-Roses en Val-de-Marne). Actionnaire et administrateur de l’Union agricole d’Afrique.

Norbert Hache est le fils d’un marchand-épicier qui assure les fonctions de maire de Sainte-Austreberthe de 1813 à 1825. Après ses études secondaires, il s’inscrit à la faculté de médecine de Paris, en 1829 ; reçu à l’internat des hôpitaux de Paris lors du concours de 1831, il entre en 1832 à l’hôpital d’Etampes (alors en Seine-et-Oise) ; en décembre 1835, il soutient sa thèse, Du croup et l’hôpital des enfants malades pendant l’année 1835 ; Broussais fait partie du jury [1]. Il reste ensuite à l’hôpital d’Etampes près de 20 ans, accédant au titre de chirurgien en chef.

Il apparaît dans la documentation fouriériste en août 1843, quand il s’abonne à La Démocratie pacifique, le nouveau quotidien de l’Ecole sociétaire [2]. En 1847, il acquiert des actions de l’Union agricole d’Afrique ; cette société, fondée par les fouriéristes lyonnais (notamment François Barrier, Henry Gautier et Aimée Beuque), a obtenu une concession de terres à Saint-Denis-du-Sig près d’Oran, sur laquelle elle souhaite mettre en œuvre quelques principes sociétaires. Mais l’entreprise connaît rapidement des difficultés et la société est menacée de dissolution. Hache fait partie des quelques actionnaires qui, au milieu des années 1850, acceptent de prêter de l’argent afin de maintenir l’exploitation ; il est même, avec 5 000 francs, l’un des principaux prêteurs ; il finance également l’achat d’un cheptel de bœufs, alors que la ferme n’a plus de bovins.

En 1856, il se marie avec Mathilde Ramel, la fille d’un directeur de l’enregistrement et des domaines, conservateur des hypothèques ; par cette union, il devient le beau-frère du peintre Ingres, lui-même marié avec Delphine Ramel, une sœur aînée de Mathilde. Le couple Hache s’installe à Paris, rue de Lille ; son adresse figure sur un répertoire d’adresses de l’Ecole sociétaire [3] ; Norbert Hache pratique la médecine, non plus dans le cadre hospitalier, mais pour une clientèle privée. Puis, au début des années 1860, la famille quitte Paris pour s’installer à L’Haÿ, dans une vaste maison. Norbert Hache abandonne l’exercice de la médecine.

Maire de L’Haÿ

En 1865, Hache est nommé maire de L’Haÿ, une commune qui comprend alors moins de 500 habitants. Sous sa direction, le conseil municipal finance la restauration du clocher de l’église, l’agrandissement du cimetière, l’amélioration des routes et des chemins, l’installation d’une borne fontaine [4]. Parallèlement, Hache entre au conseil d’administration de l’Union agricole d’Afrique en 1865, puis accède à la présidence en 1867, fonction qu’il exerce pendant une vingtaine d’années. Sa femme devient elle-même actionnaire et assiste à plusieurs assemblées générales. L’engagement de Norbert Hache dans l’Union agricole correspond à la période où, sous l’influence notamment d’Henry Gautier, la société, qui se contente jusque-là de louer ses terres et de percevoir des fermages, tente de retrouver son inspiration fouriériste originelle en revenant au faire-valoir direct et en améliorant la situation des travailleurs.

Pourtant, les Hache sont peu présents lors des manifestations fouriéristes et de façon générale dans la documentation de l’Ecole sociétaire, et il est difficile de savoir s’ils adhèrent ou non aux idéaux phalanstériens : ils ne semblent pas assister aux banquets fouriéristes, dont la tradition reprend au milieu des années 1860 ; ils n’apparaissent pas parmi les actionnaires de la Librairie des sciences sociales ou des entreprises et associations fouriéristes de la fin des années 1860 (Société de Beauregard, Maison rurale d’expérimentation sociétaire, Cercle parisien des familles). Le nom du Dr Hache figure toutefois dans La Science sociale, sur une liste de souscripteurs souhaitant contribuer au financement d’une expédition au pôle Nord ; mais ce projet n’a pas de caractère fouriériste [5]. Hache fréquente cependant régulièrement la Librairie des sciences sociales, puisque ce local qui constitue de fait le siège de l’Ecole sociétaire, accueille aussi l’administration et les réunions de l’Union agricole d’Afrique du milieu des années 1860 jusqu’au début des années 1880.

La guerre de 1870, pendant laquelle la population et la municipalité de L’Haÿ se réfugient à Paris, entraîne de nombreuses destructions dans cette commune, occupée par les troupes prussiennes ; les dommages sont aussi provoqués par les bombardements de l’artillerie française. Quand les habitants se réinstallent dans leur commune, beaucoup de maisons sont en ruine et d’autres ont souffert de pillage ; le Dr Hache a ainsi perdu « l’admirable collection » que lui a donnée Ingres, « les tableaux, les dessins, les portraits de famille laissés par le maître » [6].

Pendant la Commune, la population du village, situé entre des positions versaillaises et des positions communardes, éprouve des difficultés à se ravitailler, tandis que la sécurité des habitants est régulièrement menacée. Hostile à l’insurrection parisienne, Hache échappe lui-même de peu aux tirs de fusils et d’obus des Communards qui tentent ensuite de l’arrêter. Mais il a alors quitté sa commune, de même qu’un certain nombre d’habitants.

De retour à L’Haÿ, Hache s’efforce de reconstruire les bâtiments détruits et d’obtenir pour cela des indemnisations. En 1874, il est reconduit par élection dans ses fonctions de maire. La municipalité continue son œuvre d’amélioration des chemins vicinaux ; elle s’efforce de préserver la salubrité (elle proteste « un grand nombre de fois contre l’infection de la Bièvre ») et la moralité dans le village, en luttant notamment contre l’ouverture de nouveaux débits de boissons. En 1875, le conseil municipal vote la gratuité de l’enseignement primaire, et de façon générale, écrit le maire,

les écoles ont été l’objet d’une attention soutenue : visites fréquentes, participation aux examens de fin d’année, encouragement à l’école du soir […] Nous n’avons négligé aucun moyen pour stimuler le zèle des maîtres et l’application des élèves ; aussi notre école a-t-elle acquis un rang honorable par ses succès dans les concours cantonaux et la proportion de certificats d’études obtenus chaque année [7].

L’année suivante, le maire démissionne et s’installe alors à Paris, avenue de Wagram. Avant de quitter L’Haÿ, il fait le bilan de son action municipale, rappelant les difficultés liées à la guerre, puis au « règne néfaste de la Commune » ; à l’automne 1871,

le village était presque en ruines […]

C’est avec un légitime orgueil que nous remettons à notre successeur une commune plus florissante que jamais, son territoire sillonné de bonnes voies de communications, ses édifices publics parfaitement restaurés, ses finances en bon ordre, un budget sans centimes additionnels, un bureau de bienfaisance enrichi de plus de 1200 francs de rente, et le budget de la fabrique bien équilibré malgré les dépenses considérables qu’a occasionnées la transformation de l’église [8].

Un président contesté de l’Union agricole d’Afrique

L’Union du Sig connaît alors des jours difficiles dans la seconde moitié des années 1870 en raison de problèmes financiers croissants : le retour au faire-valoir direct supprime la principale source de revenus – les fermages – et demande des investissements importants (cheptel, matériel agricole, constructions) ; de surcroît, de mauvaises récoltes liées à la sécheresse et des accidents (notamment la rupture d’un barrage servant à l’irrigation des terres) provoquent d’importants déficits pendant plusieurs années [9]. Hache se rend plusieurs fois en Algérie (novembre-décembre 1873, 1878) afin d’examiner la situation de l’exploitation ; il doit aussi à plusieurs reprises avancer de l’argent sur ses fonds personnels pour assurer le fonctionnement de l’entreprise.

Le conseil d’administration, qui comprend Victor Considerant à partir de 1873, subit de violentes critiques de la part de certains actionnaires et notamment de Jean Griess-Traut qui publie dans La Finance nouvelle des articles très violents envers certains administrateurs, jugés incompétents (Griess-Traut dénonce la présence à la tête de la société d’officiers – Gautier – et de médecins – Hache – ne connaissant rien aux activités agricoles). Il reproche plus particulièrement à Hache et à son épouse de concentrer un trop grand nombre de procurations lors des assemblées générales, et ainsi d’obtenir la majorité et d’imposer leurs orientations grâce à des personnes absentes. Enfin, il considère que Norbert Hache n’est pas véritablement fouriériste, qu’il est même « l’adversaire résolu » de « la doctrine phalanstérienne » [10] ; il est sans doute l’auteur d’un dialogue imaginaire, également paru dans La Finance nouvelle, entre le président de l’Union et un actionnaire fouriériste, dans lequel le président avoue n’être pas phalanstérien, ne pas croire à l’association et ne pas s’intéresser à Fourier. « Si je suis des vôtres, c’est par pure spéculation et non parce que j’ai la foi », répond-il aux questions du disciple de Fourier [11]. Aussi Griess-Traut demande-t-il la démission de plusieurs administrateurs et en particulier de Hache.

Malgré ces attaques, le président de l’Union reste à son poste, alors que Gautier et Considerant quittent le conseil. Afin de sauver l’exploitation, Hache propose de vendre une partie des terres ; mais un autre administrateur, Henri Couturier parvient à convaincre la majorité des administrateurs et des actionnaires de louer l’essentiel des terrains de l’Union à la Société des Orphelinats qu’il est en train de fonder. Hache s’efforce de défendre les intérêts financiers de l’Union contre les prétentions de Couturier et des Orphelinats ; les deux hommes entrent violemment en conflit, mais Hache finit par démissionner du conseil d’administration en 1887.

Cependant, la Société des Orphelinats échouant dans son projet, elle rompt son bail avec l’Union, mais exige d’importantes indemnités pour les aménagements qu’elle a réalisés. Hache revient au conseil d’administration de l’Union à laquelle il fait un nouveau prêt. Dans les années 1890, un Hache continue à siéger parmi les administrateurs de l’Union agricole d’Afrique, sans que l’on puisse savoir si c’est Norbert, ou son fils André ; dans tous les cas, la société abandonne désormais toute perspective phalanstérienne et toute ambition sociale.

Parallèlement à son implication dans l’administration de l’Union du Sig, le Dr Hache, s’il n’exerce probablement plus la médecine, continue à s’intéresser aux problèmes de santé : il est à partir de 1880 membre de la Société contre l’abus du tabac [12]. Assurant les fonctions de délégué cantonal de L’Haÿ pour les écoles primaires, il est nommé officier de l’instruction publique en 1891 [13].

Régulièrement, il passe une partie de l’été dans le Pas-de-Calais. C’est en revenant de l’un de ces séjours, qu’il décède à Paris. Il est inhumé à Sainte-Austreberthe.


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