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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Briot, Charles (Auguste Albert)
Article mis en ligne le 23 mars 2014
dernière modification le 11 décembre 2023

par Sosnowski, Jean-Claude

Né le 19 juillet 1817 à Saint-Hippolyte (Doubs). Décédé le 20 septembre 1882 à Bourg d’Ault (Somme). Professeur de physique mathématique et d’astronomie en particulier à la faculté des sciences de Lyon puis à celle de Paris. Membre de la Société phalanstérienne de Lyon sous la monarchie de Juillet et la Seconde république. Membre du Comité d’organisation du travail à Lyon en 1848. Officier de la Légion d’honneur (1880).

Charles Briot est le fils de Victoire Régnier et de Léon Augustin Briot, négociant tanneur à Saint-Hippolyte, devenu maire de sa commune de 1830 à 1838. Après une fracture du bras mal remise qui le handicape à vie, Charles Briot doit renoncer au métier de tanneur. A seize ans, il est envoyé à Paris chez un oncle qui le place dans la pension d’un parent franc-comtois, Barbet. Ce dernier est l’époux d’une des filles du député du Doubs au Conseil des Cinq-Cents, Pierre-Joseph Briot qui a été en relation avec Charles Fourier durant le Directoire [1]. Charles Briot est inscrit au collège Saint-Louis. En 1837, il obtient les deux premiers prix au concours général de mathématiques et de physique ; en 1838, il est reçu second au concours d’entrée à l’École normale [2], puis premier à l’agrégation de physique. Il obtient son doctorat ès sciences mathématiques en 1842. En 1841, Briot est nommé professeur de mathématiques au collège royal de Reims puis à celui d’Orléans, et en 1845 à la faculté des sciences de Lyon où il enseigne les mathématiques appliquées à l’astronomie. En octobre 1848, il est nommé au lycée Bonaparte de Paris [3] puis au lycée Saint-Louis de 1852 à 1865, date à laquelle il devient professeur suppléant de Le Verrier, en astronomie puis de Lamé en probabilités, physique mathématique à la faculté des sciences de Paris. Il devient titulaire de cette chaire en 1870. De 1855 à 1882, il est également chargé puis maître de conférence à l’École normale supérieure et de 1864 à 1872, examinateur préparateur à l’École polytechnique. De son mariage avec Laure Martin (1823-1917) le 15 octobre 1842 naissent au moins 6 enfants, dont Françoise Léontine qui épouse Eleuthère Mascart, professeur de physique générale et expérimentale au Collège de France, et Mathilde qui épouse Emile Duclaux, professeur de chimie biologique à la faculté des sciences de Paris.

Fourier et Pythagore

Briot est membre de la commission chargée de l’étude pour la fondation d’une crèche modèle à Lyon [4], commission initiée par Fleury Imbert et François Barrier et à laquelle appartient également Francisque Bouillier.

Briot associe son travail scientifique à la pensée de Fourier. Le 25 décembre 1847, lors de son discours de réception à l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon, il n’hésite pas à faire un parallèle entre le principe d’analogie chez Fourier et chez Pythagore, suscitant une polémique de la part des conservateurs du Courrier de Lyon. Briot est défendu par Le Censeur, journal de Lyon :

nous y avons cherché cette pensée coupable et subversive qu’on nous avait signalée, mais tous nos efforts pour la saisir ont été infructueux ; nous n’avons rien trouvé de ce que nous y cherchions, et ce que nous pouvons dire, c’est que la pensée générale de ce discours est une pensée d’ordre et de paix.
D’ailleurs, chacun sera rassuré en sachant que les excentricités de M. Briot se sont bornées uniquement à rattacher le système de Fourier aux idées pythagoriciennes, à établir entre les vues d’un ancien philosophe, qui n’a laissé après lui que des traditions bien contestées, et les opinions de Fourier, des rapports beaucoup plus ingénieux que logiquement démontrés.
Enfin M. Briot a parlé de la misère des classes ouvrières tant en France qu’en Angleterre, et il nous semble que ce n’est pas la première fois que Le Courrier de Lyon a entendu parler de cette triste plaie de notre époque, le paupérisme, auquel, d’après M. Briot, il serait temps d’appliquer un remède efficace [5].

Son discours décrié par les conservateurs n’empêche pas son élection aux fonctions de secrétaire-adjoint de la classe des sciences de l’Académie de Lyon [6].

Un « jeune homme ardent, phalanstérien et républicain tout à la fois » [7]

C’est ainsi que Briot est décrit lors de la parution d’une liste de candidats lyonnais aux élections des représentants à l’Assemblée constituante d’avril 1848. Le Tribun du peuple signale que circule une liste imprimée « émanée, dit-on, des loges maçonniques, mais que nous croyons avoir été faite par l’école phalanstérienne, parce que la plupart des noms appartiennent à cette école, et que des socialistes populaires n’y ont été joints que pour servir de passeport aux autres » [8]. Briot s’affiche comme ouvertement phalanstérien et obtient un droit de réponse dans Le Censeur, journal de Lyon qui a reproché aux socialistes et plus particulièrement à l’Ecole sociétaire leurs « variations [...] en matière politique » [9]. Briot prend la défense du centre parisien de l’Ecole sociétaire et de sa politique depuis 1841 :

Je vous ferai remarquer seulement que l’école sociétaire me semble avoir parfaitement suivi la voie qu’elle s’est tracée dans le manifeste publié par elle en 1842 [10] sous ce titre : Bases de la politique positive, ou manifeste de l’école sociétaire fondée par Fourier. Vous, nous accusez de ne point aimer les révolutions. C’est vrai, nous n’aimons pas les agitations stériles, les convulsions violentes et désordonnés. Une fois les principes conquis, nous croyons que le progrès doit s’accomplir, non point par la destruction et la guerre mais par l’organisation pacifique par l’accord des intérêts, par l’union indissoluble de l’ordre et de la liberté. Mais quand un pouvoir vient se placer en travers du progrès, nous comprenons que le peuple brise cet obstacle [...].

Notre indifférence en matière politique n’est pas ce que vous pensez. Il est vrai que, sous le gouvernement qui vient de tomber, les socialistes critiquaient et attaquaient vivement la politique telle qu’on la pratiquait alors, c’est-à-dire : « les misérables querelles dont l’ambition du pouvoir est le fond, et qui engagent toutes les forces de l’intelligence nationale dans des intrigues funestes ou dans de stériles discussions de réformes bornées à l’ordre constitutionnel » ; mais c’était pour proclamer une politique ayant pour but la réalisation de la fraternité et « l’association des individus et des peuples pour l’accomplissement des destinées de l’humanité ».

Rejetant par ailleurs les « banales accusations d’immoralité », il poursuit :

Un mot maintenant sur la situation actuelle. Vous prétendez que le moment n’est pas venu d’étudier les questions sociales. Mais vous avez donc oublié que la révolution de 1848 a été faite par le peuple et pour le peuple ? mais vous avez donc oublié que, dès le lendemain de son installation, le gouvernement provisoire a reconnu le droit au travail et déclaré qu’il s’occuperait d’urgence de l’organisation du travail ? Il a mis cette question à l’ordre du jour ; il a fait appel à toutes les intelligences pour l’étudier et la résoudre. La question sociale est donc imminente ; c’est la grande, je dirais presque la seule question du jour. La République existe, elle est reconnue par tous. Il s’agit maintenant de la consolider, de l’asseoir sur des bases inébranlables. Et comment le faire, sinon par la conciliation des intérêts, par la fusion de toutes les classes en une seule, en un mot par la réalisation de la fraternité humaine attendue depuis si long-temps [sic] ? Or, qu’est cela, sinon la question sociale ?
Le sol est déblayé, il faut bâtir.

Ainsi, l’établissement de la République, à moins de faire du mot république une déception, un jeu cruel, l’établissement de la République ne peut prospérer que par la réforme sociale. L’ajourner serait perpétuer les causes de désordre, serait préparer de grands malheurs. Le mal existe, il faut le guérir.

Le 8 avril [11], sa candidature est rejetée par le conservateur Comité général des clubs, auquel appartient le Club des socialistes phalanstérien représenté par Juif, Despart et Sain [12].

Un membre actif du Comité d’organisation du travail de Lyon

En mars 1848, parallèlement la Commission du Luxembourg, Emmanuel Arago établit un Comité d’organisation du travail à Lyon ou commission « chargée de rechercher et de discuter les moyens les plus propres à organiser le Travail [sic] » [13]. Cette commission, présidée par Morellet, est « l’œuvre des phalanstériens » [14]. Briot en est membre et fait preuve d’une grande activité. Il propose lors de la séance du 8 mars un vœu pour « la suppression des impôts qui pèsent le plus lourdement sur la masse des travailleurs, ou qui tarissent les richesses publiques, tels que l’octroi, l’impôt sur le sel ». Il souhaite un vote de la commission en faveur « des mesures suivantes : 1° l’établissement de l’impôt progressif sur le revenu. Une partie de cet impôt reviendrait aux communes ; 2° les assurances, à l’Etat ; 3° les mines et extractions de charbon, à l’Etat ; 4° les transports, messageries, canaux, chemins de fer, à l’Etat » [15]. Le 10 mars, la commission estime que cette proposition trouve des similarités avec celle de l’ouvrier Benoit et se plaît à souligner une « telle sympathie d’idées [...] pour montrer que l’intelligence des grandes questions sociales est de toutes les classes [...] » [16]. Lors la séance du 14 mars, Briot s’oppose « à un décret du gouvernement provisoire autorisant la vente des biens de l’Etat. Il soutient que cette vente ne profitera qu’aux monopoleurs [sic], qui dans le moment de crise, achèteront à vil prix, et réaliseront ensuite de grands bénéfices » [17]. Il réclame « la conversion en monnaie de toute l’argenterie qui se trouve chez les citoyens, sauf les objets d’art » [18]. Sa proposition est critiquée par son condisciple phalanstérien Dervieu et repoussée par le Comité. Le 23 juin suivant, il n’hésite pas à condamner certains points du « projet d’association libre et volontaire entre patrons et ouvriers, et de réforme commerciale » [19], présenté par François Coignet. « Il trouve l’article 41, concernant la répartition des bénéfices, tout à fait inique et injuste, en ce qu’il fait une trop large part au capital » [20] ; s’ouvre alors un large débat qui le conforte dans sa critique. C’est donc un projet largement remanié qui est présenté à l’Assemblée constituante et publié en juillet 1848 [21].

Briot est également membre de la Société nationale d’agriculture, histoire naturelle et arts utiles de Lyon. En mai 1848, il y annonce la création de la Société républicaine pour l’enseignement à Paris, dont les membres, « jeunes professeurs, qui partout, même dans les chantiers et sur les places publiques, professent des cours [...] destinés à occuper et à développer l’intelligence du peuple » [22]. Nommé à Paris à la rentrée d’octobre 1848, il rentre probablement en contact étroit avec Victor Considerant. Ce dernier est recherché par les autorités au lendemain de la journée du 13 juin 1849 ; ses domiciles de la rue du Pot-de-Fer et de Fontenay-aux-Roses sont perquisitionnés. Par la même occasion sont saisis chez son voisin « Briot, professeur de mathématiques, rue du Pot-de-Fer : [des] extraits des procès-verbaux des séances de la Société Phalanstérienne de Lyon (29 septembre, 3, 6 octobre 1848) ; [les] n° 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12 de Résurrection sociale » [23]. A défaut de fournir des renseignements sur le rôle et les positions de Briot, ces procès-verbaux relatifs à différents vœux proposés par le Société phalanstérienne de Lyon pour le Congrès phalanstérien qui se tient à Paris du 16 au 19 octobre 1848, démontrent la réticence avérée de François Coignet et François Barrier envers l’orientation donnée par Victor Considerant à l’Ecole sociétaire et à La Démocratie pacifique, en particulier depuis la Révolution de février. Si le nom de Briot est inscrit dans le « répertoire Noirot » [24], rien n’indique qu’il ait une quelconque activité au sein du centre parisien de l’Ecole sociétaire au cours des décennies suivantes.


Aphorisme du jour :
Les sectes suffisent à elles seules à guider la politique humaine dans le labyrinthe des passions
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