Né le 19 floréal an VI (8 mai 1798) à Annonay (Ardèche). Chef d’atelier fabricant d’étoffes de soie. Membre du Groupe phalanstérien des travailleurs de Lyon (Rhône).
Jean-Jacques Morel est le fils non reconnu de Jean Morel et de Marguerite Petit décédée lorsque le 4 février 1823, à Lyon, il épouse Marie Bouvard, fille de Jean Bouvard, marchand tripier et de Louise Nicolas. Jean-Jacques Morel réside alors rue Confort. De cette union naissent au moins quatre enfants (Laurent né vers 1825, Marie vers 1824, Félix vers 1828 et Guy-Jean le 18 mars 1831). Jean-Jacques Morel s’installe au 25 côte des Carmélites et il est spécialisé dans la fabrique de cravates et gilets en soie. En 1847, il réside au 19 rue Tholozan avec deux de ses enfants et trois ouvriers.
Il est l’un des dirigeants du Groupe phalanstérien des travailleurs de Lyon et l’un de ceux qui, au moins depuis 1843, interviennent régulièrement lors des banquets célébrant les anniversaires de la naissance ou du décès de Fourier. Selon L’Écho de l’industrie, Morel porte un toast « plein d’une religieuse conviction [...] à la mémoire de Fourier » [1] lors de celui qui se tient le 11 ou 16 octobre 1846 et qui est annoncé, fallacieusement selon La Tribune lyonnaise, comme celui du Groupe phalanstérien des travailleurs de Lyon. La Tribune lyonnaise note également que lors du banquet du 18 octobre organisé cette fois officiellement par le Groupe phalanstérien des travailleurs de Lyon, il s’adresse « à M. Barrier, l’ardent propagateur de la science sociale » [2] qui dirige le groupe lyonnais proche du centre parisien de l’École sociétaire. En avril 1847, il est l’un des organisateurs du banquet anniversaire de la naissance de Fourier qu’organise le Groupe phalanstérien des travailleurs de Lyon. Lors du banquet d’octobre 1847, il prononce « une vigoureuse apostrophe aux hommes qui veulent rester dans l’ornière de la civilisation actuelle » [3] :
Civilisés, que vous êtes aveugles ! L’histoire du passé et les maux présents que vous souffrez vous crient que vous faites fausse route, et vous ne comprenez pas. Vous si fiers de votre société, et qui vous flattez d’être en voie de progrès ; allons donc !... Vous êtes comme les sourds et les aveugles de Judée ! leurs oreilles se fermaient aux cris de la douleur ; leurs yeux aux rayons de la lumière, et ils auraient péri si Dieu n’eût fait naître parmi eux un fou ! oui un fou ! car c’était le nom que les Hébreux donnèrent au Christ, lorsqu’il leur apporta le dogme de la fraternité. Hélas ! depuis l’ère du Christ, ce dogme est resté lettre morte. Que de combats a suscité le génie du mal contre le génie du bien ! Après la chute des Césars du grand empire romain, vinrent les Césars de la féodalité tout bardés de fer ! mais les uns et les autres ont été pulvérisés à l’aide du verbe sacré : fraternité ! Pauvre civilisation ! pauvre humanité ! l’exemple du passé ne peut-il donc, te suffire ? les faits présents, les tourments inouïs chez la presque totalité prouvent le contraire. D’autres Césars se sont reproduit avec des sentiments plus infimes : ce sont aujourd’hui des Césars bardés d’or et d’argent. Espèrent-ils un meilleur sort que leurs devanciers ? Travailleurs ! si vous n’êtes point les esclaves de la matière, du courage !... Dieu est avec vous, et comme aux travailleurs de la Judée, il a fait naître aussi un fou parmi vous, et ce fou, c’est Charles Fourier ! Charles Fourier qui nous a révélé la loi de la série et l’organisation du travail. A Charles Fourier !
En mars 1848, il est membre du Comité d’organisation du travail à Lyon [4], commission établie par Emmanuel Arago « chargée de régler les différends entre patrons et ouvriers et de rechercher la meilleure organisation sociale » [5]. Cette commission, présidée par Morellet], « était l’œuvre des phalanstériens » [6]. Il est l’auteur d’un dessin allégorique de la France « Abondance France Progrès » [7], lithographié par Burgelin, allégorie reproduite ultérieurement dans le volume IX de l’Histoire socialiste dirigée par Jean Jaurès [8].
[1] L’Écho de l’industrie, 17 octobre 1846, p. 3.
[2] « Groupe phalanstérien des travailleurs de Lyon. Discours et toasts prononcés au banquet anniversaire de la mort de Charles Fourier, le dimanche 18 octobre 1846 », La Tribune lyonnaise, novembre 1846, pp. 95-96.
[3] « Anniversaire de la mort de Charles Fourier », La Tribune lyonnaise, octobre 1847, p. 73.
[4] L’Organisateur lyonnais, bulletin républicain, 16 mars 1848, pp. 1-2.
[5] Cité par Léon Lévy-Schneider, « Les débuts de la révolution de 1848 à Lyon à propos d’un ouvrage récent », Revue d’histoire moderne et contemporaine, tome IX, 1911, p. 55.
[6] Joseph Benoit, Souvenirs de la République de 1848, Lyon-Paris, Genève, Duchamp et Cie, Corraterie, 1855, p. 37.
[7] Maurice Agulhon, Ségolène Le Men [catalogue réd. par], Les Révolutions de 1848, 1, une république nouvelle, [exposition], Assemblée nationale, Galerie des fêtes, du 4 février au 30 mars 1998, Paris, Assemblée nationale, 1998, p. 129.
[8] Georges Renard, La République de 1848, Paris, Jules Rouff, 1906, p. 5.
Sources
Archives municipales de Lyon, 2E215 état civil de Lyon, acte de mariage n° 103 du 4 février 1823 (en ligne sur le site des Archives municipales de Lyon, vue 41).
Archives municipales de Lyon, 2E258 état civil de Lyon, acte de naissance de Guy-Jean Morel, n° 1123 du 19 mars 1831 (en ligne sur le site des Archives municipales de Lyon, vue 154).
Archives départementales du Rhône, 6MP10 recensement, rue Côte des Carmélites, 1836 (en ligne sur le site des Archives départementales du Rhône, vue 10).
Archives départementales du Rhône, 6MP38 recensement, rue Côte des Carmélites, 1841 (en ligne sur le site des Archives départementales du Rhône, vue 8).
Archives municipales de Lyon, 921WP237 recensement, 1er arrondissement, jardin des plantes, 1844 pour 1845, 5e section, Saint-Vincent (en ligne sur le site des Archives municipales de Lyon, vue 118).
Archives municipales de Lyon, 921WP252 recensement, 1er arrondissement, jardin des plantes, 1846 pour 1847, 4e section, Saint-Vincent (en ligne sur le site des Archives municipales de Lyon, vue 119).
Annuaire administratif, statistique et commercial de la ville de Lyon et du département du Rhône, pour 1839, suivi d’un indicateur général des habitants de la ville et des faubourgs..., Lyon Pélagaud et Lesne, 1839, p. 152 (en ligne sur Google livres).
Indicateur annuaire de la fabrique d’étoffes de soie de Lyon, pour l’année 1843, contenant près de 4 000 adresses spéciales, ..., première année, Lyon, Dumoulin, Ronet et Sibuet, 1843, p. 73 (en ligne sur Google livres).
L’Écho de la fabrique de 1841, 30 avril 1843, p. 3 (en ligne sur la Bibliothèque numérique de Lyon, Numelyo).
L’Écho de la fabrique de 1841, 30 avril 1844, p. 2 (en ligne sur la Bibliothèque numérique de Lyon, Numelyo).
L’Écho de l’industrie, 17 octobre 1846, p. 3 (en ligne sur la Bibliothèque numérique de Lyon, Numelyo).
« Fouriérisme », La Tribune lyonnaise, novembre 1846, pp. 89-90 (en ligne sur la Bibliothèque numérique de Lyon, Numelyo).
« Groupe phalanstérien des travailleurs de Lyon. Discours et toasts prononcés au banquet anniversaire de la mort de Charles Fourier, le dimanche 18 octobre 1846 », La Tribune lyonnaise, novembre 1846, pp. 95-96 (en ligne sur la Bibliothèque numérique de Lyon, Numelyo).
La Tribune lyonnaise, avril 1847, p. 17 (en ligne sur la Bibliothèque numérique de Lyon, Numelyo).
« Anniversaire de la mort de Fourier à Lyon », La Démocratie pacifique, 25 octobre 1846.
L’Organisateur lyonnais, bulletin républicain, 16 mars 1848, pp. 1-2 (en ligne sur la Bibliothèque numérique de Lyon, Numelyo).
« Anniversaire de la mort de Charles Fourier », La Tribune lyonnaise, octobre 1847, p. 73-74 (en ligne sur la Bibliothèque numérique de Lyon, Numelyo).
Joseph Benoit, Souvenirs de la République de 1848, Lyon-Paris, Genève, Duchamp et Cie, Corraterie, 1855, p. 37 (en ligne sur Hathi trust).
Bibliographie
Maurice Agulhon, Ségolène Le Men [catalogue réd. par], Les Révolutions de 1848, 1, une république nouvelle, [exposition], Assemblée nationale, Galerie des fêtes, du 4 février au 30 mars 1998, Paris, Assemblée nationale, 1998, p. 129.
Georges Renard, La République de 1848, Paris, Jules Rouff, 1906, Histoire socialiste, tome IX, sous la dir. de Jean Jaurès, p. 5 (en ligne sur la bibliothèque libre Wikisource).
Léon Lévy-Schneider, « Les Débuts de la révolution de 1848 à Lyon à propos d’un ouvrage récent », Revue d’histoire moderne et contemporaine, tome IX, 1911, pp. 24-61, 177-198.
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