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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Vallot, Claude
Article mis en ligne le 18 décembre 2012
dernière modification le 12 juillet 2021

par Desmars, Bernard

Né le 7 décembre 1810 à Ouges (Côte-d’Or), décédé le 29 juillet 1883 à Tournus (Saône-et-Loire). Ouvrier d’imprimerie. Abonné aux différents organes phalanstériens. Partisan de l’essai sociétaire.

Claude Vallot est le fils d’un jardinier installé d’abord à Ouges, puis à Dijon. Il se marie en 1830 avec Marie Jeunet, qui est aussi la fille d’un jardinier, mais qui décède en 1833. Il se remarie l’année suivante avec Philiberte Faivre, 18 ans, fille d’un cordonnier.

Favorable à la réalisation

Prote d’imprimerie, il travaille à Dijon jusqu’à la fin des années 1870. On ignore à partir de quand il adhère aux idées fouriéristes. Il ne figure pas sur la liste dressée par Oudot en 1839 et indiquant la trentaine de Dijonnais se disant « hautement phalanstériens » [1]. En tout cas, au milieu des années 1850, il souscrit au projet de colonie à Réunion (Texas) [2]. Et il est abonné à La Science sociale (1867-1870) [3], puis au Bulletin du mouvement social (1872-1879). Ce dernier organe lui paraît toutefois trop orienté vers les « questions accessoires […] de coopération et de garantisme », tandis que « la véritable question, celle de l’attraction industrielle, [est] à peine effleurée » [4]. Certes, Vallot concède que la réalisation d’un phalanstère ne peut être sérieusement envisagée pour le moment. Mais il souhaite que le Bulletin s’intéresse davantage à l’éducation et promeuve des formes d’enseignement directement inspirées du fouriérisme.

Lui-même soutient les efforts d’Adolphe Jouanne qui, dans la Maison rurale d’expérimentation sociétaire, à Ry, s’efforce d’appliquer les principes fouriéristes en matière éducative. Il lui adresse un peu d’argent (18 francs pour le capital de la société, soit la plus faible contribution d’après la liste des souscripteurs de 1876 ; et 6 francs pour la Ligue de l’éducation nouvelle) [5]. Il lui envoie aussi ses encouragements : la Maison rurale, ce « modeste spécimen », écrit-il, est « le seul moyen d’entraîner de nombreuses adhésions et de faire entrer l’humanité dans la voie de sa destinée. […] Ce sera à vous [Jouanne] que l’Ecole devra ce triomphe » [6] ; mais, il déplore le manque d’enthousiasme des fouriéristes pour cette œuvre : « Ah ! si tous nos condisciples comprenaient, eux aussi ! mais la plupart sont indifférents ou découragés et, je le dis avec douleur, le jour vient où les vieux seront descendus dans la tombe, et il n’y aura point de jeunes pour les remplacer…. Cependant, il ne faut pas désespérer » [7].

« Surveillé et pourchassé »

A Dijon même, dans les années 1870, il fait circuler des ouvrages et le Bulletin du mouvement social, afin de propager les idées sociétaires et aussi de « stimuler le zèle par trop rafraîchi de nos anciens condisciples de Dijon » ; il n’a d’ailleurs plus beaucoup de relations avec eux, alors qu’il a existé dans cette ville un véritable groupe phalanstérien dans les décennies précédentes [8]. Mais ses efforts restent vains : « A Dijon, je n’ai pu décider [à s’abonner] ceux à qui j’en ai parlé ; à les entendre, ils n’ont pas le temps de lire » [9]. Du reste, son activité phalanstérienne est contrariée par « les ennemis dont [il est] entouré, aussi bien à [son] domicile qu’à l’atelier » ; « surveillé et pourchassé » [10], il ne peut lire chez lui le Bulletin du mouvement social et le périodique publié par Jouanne : « j’ai une femme qui devient hydrophobe [c’est-à-dire ici, enragée] rien que de penser que je lis de pareilles horreurs » ; et il lui est « encore plus difficile de trouver le moyen d’écrire [à la rédaction du Bulletin] que de lire ». Enfin, « la même persécution a lieu aussi à l’égard de mes livres ; on a presque complètement détruit ma collection de l’École sociétaire. C’est à peine si j’ai pu sauver quelques petits livres en les cachant dans le local de l’imprimerie où je travaille » [11].

En 1878, il part travailler à Chalon-sur-Saône, où son gendre Bellenand a fondé une imprimerie. Il espère, à l’abri des « persécutions » de sa femme, restée à Dijon, nouer des liens avec des fouriéristes de Chalon [12]. Comme d’autres militants provinciaux peu à peu réduits à l’isolement, il est très attentif aux manifestations phalanstériennes parisiennes : il voit « avec bonheur que l’anniversaire du 7 avril est célébré comme autrefois » ; il en éprouve « une joie bien vive surtout à cause du toast de notre vénérable et vénéré M. Muiron, le doyen des disciples du grand fondateur de la Science sociale, l’auteur de Vices de nos procédés industriels et des Transactions sociales et religieuses, ouvrages que j’ai lus et relus, et que je lis toujours avec un vif intérêt » [13].

Deux années plus tard, il est à Tournus, toujours comme prote d’imprimerie et avec son gendre. Il s’engage à verser pendant trois ans 25 francs chaque année pour maintenir en vie la librairie des sciences sociales, ce qu’il fait en 1880 et 1881, mais pas en 1882, à l’instar de beaucoup de ses condisciples qui ne croient plus en la possibilité de prolonger l’existence de cet établissement [14]. Parallèlement, il continue à encourager Jouanne et à soutenir la Maison rurale, « l’œuvre la plus progressive que l’on ait jamais conçue », mais qui connaît alors de graves difficultés ; il rappelle être un ardent partisan de l’expérimentation et déclare saisir « toutes les circonstances pour appeler l’attention sur la doctrine du libre essor des facultés et sur la nécessité de les développer, de les cultiver et utiliser » [15]. Il meurt quelques mois plus tard, à Tournus.