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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Silberling, (François Henri) Édouard
Article mis en ligne le 17 décembre 2012
dernière modification le 11 juillet 2021

par Desmars, Bernard

Né le 2 novembre 1808 à Strasbourg (Bas-Rhin), décédé le 8 mars 1876 à Strasbourg (alors dans l’Empire allemand). Agent d’une compagnie d’assurance et d’une caisse de libération hypothécaire. Correspondant du groupe fouriériste strasbourgeois dans les années 1840. Animateur d’un club républicain sous la Seconde République.

Edouard Silberling, dont le père est qualifié successivement de « bachelier en droit » (lors de la naissance d’Edouard), de notaire et d’agent d’affaires, fait partie du groupe fouriériste de Strasbourg, dès 1833 semble-t-il [1] ; en 1836, il figure sur une liste des abonnés envoyée par Carnari (voir ce nom), l’animateur de ce groupe et le correspondant de l’École à Strasbourg [2]. L’année suivante, au lendemain d’un appel à souscription lancé par Considerant dans La Phalange afin de financer les études et les plans d’un essai sociétaire, il s’engage pour 200 francs auprès du Centre parisien, tout en promettant de faire son possible pour augmenter cette somme [3].

En 1838, au moment de son mariage avec la fille d’un cordonnier de Strasbourg, Édouard est directeur de la « caisse de libération des dettes hypothécaires » et agent pour la compagnie d’assurance contre l’incendie, le Réparateur. Au moins quatre enfants naissent : Edouard (fils), Maximilien, Armand et Charles, ce dernier mourant vers l’âge de deux ans ; les deux premiers embrassent les convictions fouriéristes de leur père, ce qui ne semble pas être le cas du troisième, futur officier de l’infanterie.

Dans les années 1840, après le décès de Carnari, Silberling est désigné par un de ses condisciples strasbourgeois comme le correspondant, ou le « représentant » du groupe fouriériste local [4].

Démocrate-socialiste sous la Seconde République

Après la révolution de février 1848, Edouard Silberling est très actif dans les milieux républicains et dans les clubs politiques qu’il semble fréquenter régulièrement. Il est membre du club de la Réunion des arts ; mais il assiste aussi à quelques réunions du club de la rue Sainte-Hélène, où, selon le rapport d’un commissaire de police, il affirme le 11 mai 1849 que « le Ministère ainsi que le président de la République [ont] sacrifié l’honneur de la France en envoyant une armée en Italie pour anéantir la République romaine » ; il propose aux participants de signer un texte « adressé à la Chambre future pour la mise en accusation du ministère et du président de la République » [5]. Ces activités lui valent des poursuites en 1849, à la suite en particulier de troubles qui éclatent à Strasbourg le 14 juin, et qui sont interprétés par les autorités comme une tentative insurrectionnelle liée à la manifestation qui a eu lieu la veille à Paris. Avec neuf autres personnes, dont Émile Kuss, professeur à la faculté de médecine de Strasbourg et gérant du Démocrate du Rhin, il se retrouve inculpé « d’attentat ou complot ayant pour but de changer ou de détruire le gouvernement de la République et d’excitation à la guerre civile » ; finalement, sept accusés sont renvoyés devant les assises ; deux s’étant enfuis, ils ne sont que cinq, dont Silberling, à être écroués, puis traduits, non devant la cour d’assises du Bas-Rhin, à Strasbourg, où ils auraient pu bénéficier de sympathies au sein du jury, mais à Metz où le procès se déroule en octobre 1849.

On reproche aux accusés d’appartenir à un « comité démocratique central » qui aurait favorisé l’agitation politique par les articles publiés dans la presse et les discours prononcés dans les clubs, puis qui aurait organisé des manifestations à Strasbourg et dans plusieurs villes du Bas-Rhin, du 14 au 16 juin. Silberling aurait dans un club, le 9 juin, demandé l’institution d’un comité de salut public, et se serait de façon générale signalé par « l’exagération de ses propositions » ; le 14, il aurait même souhaité que les manifestants, dont les gardes nationaux, s’emparent de la citadelle de Strasbourg et fraternisent avec les soldats ; il serait ensuite intervenu afin que l’agitation continue les jours suivants. Lors de son interrogatoire, Siliberling affirme ses convictions : « mon opinion est que la démocratie n’est pas encore établie, en ce sens que l’exploitation de l’ouvrier par le maître n’a pas encore disparu » ; il se prononce pour « le droit au travail » ; il reconnaît avoir proposé le 9 juin la création d’un comité de salut public, mais, précise-t-il, « il n’est nullement entré dans mon esprit d’évoquer les souvenirs de 93 que j’ai toujours blâmés et combattus » ; et il nie avoir appelé à l’insurrection ou participé à un complot. Finalement, tous les accusés sont acquittés [6].

A la même époque, il est également poursuivi devant le tribunal correctionnel de Strasbourg pour escroquerie, mais est également acquitté pour cette affaire, le tribunal soulignant même l’honnêteté du prévenu [7].

Il reprend ensuite ses activités professionnelles, et ne semble pas avoir été inquiété lors du coup d’État du 2 décembre 1851. Au début du Second Empire, l’Almanach alsacien le présente comme un « agent d’affaires » avec les activités suivantes : « Affaires de famille, successions à l’intérieur et à l’étranger, affaires judiciaires et administratives, comptabilité, règlement de comptes, liquidations, commissions de ventes, d’achats de placements hypothécaires, rédactions, correspondances, etc. » [8]

En 1871, au lendemain de la guerre franco-prussienne et malgré l’annexion de l’Alsace à l’Empire allemand, il reste à Strasbourg, alors que ses fils rejoignent la France (Edouard et Armand) ou l’Autriche (Maximilien). « Après 42 jours de bombardement continu, nous voilà allemands, mais j’espère pour un temps seulement », écrit-il en mars 1871 à Jouanne, le fondateur de la Maison rurale à Ry (Seine-Maritime) auquel il apporte son soutien moral et financier : « il est temps de se mettre à l’œuvre et surtout de faire converger nos efforts sur un seul point » ; certes, « on parle dans le vide dès qu’on parle d’autre chose que de la guerre. Ayons toutefois bon courage et serrons nos rangs, nous savons que la victoire est pour nous » [9].