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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Textor de Ravisi, Anatole Arthur
Article mis en ligne le 29 septembre 2012
dernière modification le 1er février 2015

par Desmars, Bernard

Né le 15 juin 1822, à Bourges (Cher), décédé le 8 janvier 1902 à Paris. Officier de l’infanterie de marine, administrateur du comptoir français de Karikal (Inde), auteur de travaux d’ethnographie. Membre, puis président d’honneur de l’Union phalanstérienne, et membre du comité d’honneur de l’École Sociétaire Expérimentale.

Textor de Ravisi est le descendant d’une vieille famille noble issue du Forez, et le fils d’un brillant officier de Napoléon 1er, fait baron pendant les Cent-Jours, décédé en 1826. Il fait ses études au prytanée de La Flèche, puis est admis en 1840 à l’École militaire de Saint-Cyr, dont il sort en 1842 pour rejoindre l’infanterie de marine.

Un officier et un administrateur

Il participe à plusieurs opérations militaires : la prise de l’île de Mogador, au Maroc, en 1844 (il reçoit alors la légion d’honneur), et la colonisation des plaines des Palmistes et des Cafres (1847-1852) à la Réunion. Avec un certain F.-J. Secrétan, il est par ailleurs l’inventeur d’un appareil de géodésie et de topographie, le « Néopantomètre ». Les appréciations de ses supérieurs sont élogieuses : d’une « capacité remarquable », c’est un « jeune homme fort distingué », qui « fera certainement honneur à l’arme, mais il a besoin d’acquérir des habitudes militaires » [1]. Il se marie en novembre 1848 avec Claire Léontine Hamelin la fille d’un officier et propriétaire de Saint-Denis de la Réunion. Le couple aura six enfants.

Nommé capitaine en 1850 et employé à des tâches administratives (règlementation de l’état civil, organisation fiscale) et à des travaux de mise en valeur de la Réunion (construction de ponts, de chaussées), Textor de Ravisi revient en France en 1852 ; il est ensuite nommé responsable (« chef de service ») de l’administration du comptoir de Karikal, qui fait partie des Établissements français de l’Inde, de 1853 à 1863. Il est promu officier de la légion d’honneur en 1860 et chef de bataillon d’état-major d’infanterie en 1861. En raison de son état de santé, il donne sa démission en décembre 1863, et l’année suivante, obtient un poste de percepteur-receveur des contributions indirectes ; il exerce en différents lieux, et principalement à Bohain (Aisne), de 1864 à 1870 ; pendant cette période, il visite avec son épouse le Familistère de Guise) [2] ; en 1870, il est nommé à Nantes (Loire-Inférieure), où il préside en 1871 le « comité permanent de la liberté électorale » ; enfin, à partir de 1874, il exerce à Saint-Etienne (Loire), avant d’être admis à la retraite en 1885 [3].

Il continue toutefois à s’intéresser à l’Inde française, puisqu’il est en 1882 candidat pour la représenter à la Chambre des députés. Il se présente en tant que « candidat républicain hindo-européen [sic] » [4], puis aux élections de 1889, à nouveau sans être élu. En 1889 également, il devient commandeur de la légion d’honneur ; il est par ailleurs dignitaire de plusieurs ordres étrangers. Il a aussi une activité de publiciste sur les questions orientales et coloniales. Il est ainsi « directeur politique du journal Marines et colonies » [5].

Ethnographie et orientalisme

Parallèlement à son activité dans l’administration fiscale, il participe aux travaux de plusieurs sociétés savantes (Société asiatique, Société d’ethnographie, dont il est l’un des dirigeants avant d’en être élu membre d’honneur en 1897 [6], l’Alliance scientifique universelle) ainsi qu’à plusieurs congrès réunissant des ethnographes et en particulier des orientalistes. En 1900, il est nommé premier vice-président du comité d’organisation du congrès international des sciences ethnographiques [7]. Ses communications orales et ses publications portent en général sur l’Inde (Le Temps le présente en 1877 comme un « savant indianiste » [8]), mais aussi sur le Japon (il fait une conférence en 1897 sur la légende japonaise de la poétesse Komali [9]).

Il retrouve d’ailleurs à la Société d’ethnographie plusieurs autres fouriéristes, tels Eugène Verrier et Albert Gauttard. Grâce à ses travaux scientifiques, il est nommé officier de l’instruction publique.

Des activités fouriéristes connues seulement pour la fin du XIXe siècle

Dans une lettre de 1898, Textor de Ravisi déclare être « disciple de Fourier depuis 1844 » [10] ; mais ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle qu’il joue un rôle de premier plan au sein du monde sociétaire. En 1897, il figure parmi les abonnés de La Rénovation, et la même année, participe à l’anniversaire de la naissance de Fourier, le 7 avril ; près de la tombe du Maître, il prononce un bref discours, où il admet que les fouriéristes sont « pour beaucoup, même pour de bons esprits, des démodés, de 1808, de 1822, de 1834 ; des fossiles enfin ! » ; mais, ajoute-t-il, « dans la plupart des choses actuelles, on trouve l’application ou la contrefaçon, plutôt, des pensées géniales du système fouriériste » ; aussi ne devrait-il pas être bien difficile de « démontrer que nous sommes bien vivants » [11]. Il fait partie du « comité de la statue de Fourier » [12] ; il apporte aussi sa contribution financière à la réalisation du monument. Dans les mêmes temps, il projette la création d’un « Institut Charles Fourier », à la fois lieu de réunion et centre de documentation sur le fouriérisme [13].

En 1897, il accompagne les dissidents de l’Union phalanstérienne et de l’École Sociétaire Expérimentale, qui se séparent d’Alhaiza et du groupe de La Rénovation ; il est dans les dernières années du XIXe siècle le président d’honneur de l’Union phalanstérienne et membre du comité d’honneur de l’École Sociétaire Expérimentale [14], mais il s’efforce de pacifier les relations entre ces groupes et l’École sociétaire dirigée par Alhaiza, espérant, « non pas la fusion, mais l’union des divers groupes fouriéristes », afin « d’arriver au plus vite au but souhaité », l’évolution vers le monde phalanstérien [15]. « Ce vénérable patriarche, chaque fois que sa santé n’y mettait pas obstacle, ne manquait aucune de nos réunions et souvent il lui est arrivé de rétablir la paix et la concorde dans nos phalanges malheureusement trop divisées par de puériles querelles », écrit son condisciple Verrier [16]. Alors que les relations entre les deux courants fouriéristes sont à peu près rompues, il continue à entretenir des liens avec Alhaiza, et d’après ce dernier, approuve la « Lettre ouverte à M. J. Jaurès » publiée dans La Rénovation afin de protester contre la prétention du leader socialiste à s’instituer en héritier de Fourier [17].

Militant pacifiste, il est aussi président d’honneur du Zollverein européen fondé par son condisciple Gromier ; et La Rénovation reproduit en 1901 un article de Textor de Ravisi en faveur de l’émission d’un timbre international [18].