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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Colignon, Eugène (Henri Joseph)
Article mis en ligne le 12 janvier 2019

par Desmars, Bernard

Né vers 1810. Officier de l’armée belge. Membre du groupe phalanstérien de Bruxelles.

Eugène Colignon est le fils d’un receveur des douanes ; il passe une grande partie de sa jeunesse à Maastricht, avec son frère cadet Achille. Il entre ensuite dans l’armée belge ; en 1836, il est nommé sous-intendant adjoint détaché au département de la Guerre, ce qui équivaut au grade de lieutenant [1]. Il fait alors partie d’une « vente » fondée par les carbonari en Belgique [2].

Avec son frère, il fait partie dans les années 1840 du groupe phalanstérien de Bruxelles [3]. Les deux hommes s’occupent du dépôt bruxellois des livres sociétaires [4].

Cependant, les fouriéristes bruxellois désapprouvent l’engagement résolu de Considerant et du Centre sociétaire parisien dans le combat politique et la lutte électorale après Février 1848. Ils décident de dissoudre leur groupe. Néanmoins, les frères Colignon restent en relation avec les fouriéristes français, auxquels ils envoient le produit de la rente versée par leurs condisciples bruxellois ; ils s’occupent aussi des réclamations concernant les exemplaires de La Démocratie pacifique non reçus par les abonnés belges [5].

Cantagrel, réfugié en Belgique, juge de façon très sévère l’activité et l’influence des deux frères :

ces deux petits jeunes vieillards qu’on appelle Colignon ont fait bien du mal ici. A À force d’avoir peur et froid, ils ont fait peur et froid à tout le monde et cependant ils se plaignent que l’atmosphère est glacée autour d’eux ; ils prennent l’effet pour la cause et la froideur qu’ils communiquent pour une froideur qui leur est communiquée. À force de crier contre les démagogues et de dire que l’École aurait dû s’abstenir de politique, à force de crier contre les Français, ce peuple inconstant ! et de dire que les Belges feront bien mieux que nous quand ils s’occuperont de socialisme et d’ajouter que si les Anglais commençaient, ils rencontreraient un succès partout où nous n’avons que des échecs. Ils sont tellement hors de tout que […], tout le monde les considère comme nageant en pleine réaction. C’est une erreur : ils seront des plus ardents, du jour où le vent commencera à enfler nos voiles. Mais que voulez-vous ! Ils ont la manie de critiquer et de disputailler, et puis l’âme est vraiment malade et ils se font du mauvais sang au physique comme au moral. Bref, depuis six mois ils nous tiennent le bec dans l’eau, négligeant la Rente, voulant s’en débarrasser mais hésitant toujours parce que enfin si cette fonction de collecteur est sans profit, elle n’est pas sans honneur [6].

En janvier 1851, Victor Considerant, alors à Namur, adresse ses vœux pour la nouvelle année aux frères Colignon. C’est Eugène qui lui répond. Après avoir formulé des vœux de bonne santé pour Julie et Victor Considerant ainsi que pour Clarisse Vigoureux, il ajoute en son nom et celui de son frère :

Nous avons que vous avez le projet d’achever Destinée et de commencer l’important travail sur la philosophie de l’école. Cette œuvre serait de la plus haute utilité. Notre époque ne sait plus ce qu’elle doit croire ; il lui faut une religion qui satisfasse sa raison et son cœur.

Alors que Victor Considerant vient de publier La Solution ou le Gouvernement direct du peuple, Eugène Colignon observe dans cette même lettre :

Nous ne sommes pas encore convertis à la doctrine de la législation directe, que nous ne croyons ni praticable, ni même désirable aujourd’hui. Sans doute, il ne faut pas qu’une assemblée de mandataires ait le pouvoir exorbitant de faire des lois contraires à la volonté de ses commettants, mais il nous semble que le projet de constitution de Ch. Teste [proche de Buonarroti], publié en 1831 propose des moyens plus pratiques pour arriver à ce résultat [7].

Si l’on connaît bien la suite de la carrière d’Achille Colignon, on ignore ce qu’est devenu ensuite Eugène Colignon – on sait cependant qu’il est toujours attaché au ministère de la Guerre en 1854, comme sous-intendant de 2e classe, soit l’équivalent de capitaine [8] – et notamment la date de son décès.