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Site internet de l’Association d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier

Grill, Vincent (Raymond)
Article mis en ligne le 9 octobre 2018

par Desmars, Bernard

Né le 7 mai 1821 à Estagel (Pyrénées-Orientales). Agent voyer à Prades (Pyrénées-Orientales). Abonné à La Démocratie pacifique, soutien financier de l’École sociétaire, propagandiste des idées fouriéristes à Prades.

Vincent Grill est le fils d’un instituteur qui exerce successivement à Estagel, puis à Collioure dans les Pyrénées-Orientales. Il est agent voyer et demeure à Prades (Pyrénées-Orientales). Lui et son frère aîné Émile, conducteur des Ponts et Chaussées, sont tous les deux fouriéristes ; la correspondance envoyée au centre parisien de l’École sociétaire est généralement commune aux deux et signée de leur seul patronyme, ce qui, souvent, ne permet pas d’identifier le scripteur ; les deux frères ont un abonnement commun à La Démocratie pacifique  ; quand ils envoient six francs pour la rente sociétaire, ils précisent qu’il faut compter trois francs pour chacun. Et ils décrivent leur engagement sans vraiment distinguer les tâches de l’un et de l’autre.

Leur correspondance, qui est conservée dans les archives de l’École sociétaire, ne date que des années 1849 et 1850. Cependant, leur engagement fouriériste est probablement antérieur. Dès février 1848, ils diffusent à Prades le thème de l’organisation du travail parmi les ouvriers. Ils y auraient gagné de l’influence sur la population locale ce qui aurait suscité l’inquiétude des autorités. Dans leurs lettres, ils disent leur crainte de perdre leur emploi, ce qui ôterait tout moyen de subsistance à leur foyer, aussi composé de leur père infirme et d’une sœur célibataire.

Vous comprendrez, nous n’en doutons pas, notre réserve au sujet de la souscription [destinée à financer la reparution de La Démocratie pacifique], et pourquoi nous n’avons pas encore formé un groupe phalanstérien [1].

Vincent Grill est effectivement « révoqué de ses fonctions d’agent voyer sur des dénonciations infâmes et calomnieuses » vers la fin du printemps ou au début de l’été 1850 [2], Émile ayant lui-même perdu son emploi quelques semaines plus tôt.

Nous voilà donc, pour avoir compris et avoir dit qu’il y avait réellement moyen de rendre les hommes beaucoup plus heureux qu’ils ne sont sur la terre, nous voilà réduits à ne savoir comment employer nos facultés pour nous procurer de quoi subvenir à nos besoins […]. Et notez que nous avons encore notre vieux père et une sœur à soutenir [3].

Certes, les deux frères continuent à exprimer leur « confiance dans les sublimes vérités trouvées par Fourier, malgré les entraves de tout genre suscitées par les ennemis du progrès ». Aussi ne peuvent-ils plus s’abonner à La Démocratie pacifique devenue hebdomadaire.

Nous espérons cependant pouvoir continuer de vous envoyer la rente, que nous avons promise. Nous ne cesserons dans tous les cas que s’il nous est tout à fait impossible de continuer.

Un jour viendra peut-être où nous pourrons faire davantage. En attendant nous répandons, autant qu’il nous est possible, les idées de solidarité générale et d’organisation du travail. C’est tout ce que nous pouvons faire pour l’instant [4].

La lettre que les deux frères cosignent le 7 juillet 1850 est la dernière manifestation de leur activité fouriériste que conservent les Archives sociétaires.

En 1858, Émile et Vincent Grill obtiennent deux brevets d’invention, l’un pour « un instrument graphique dit compas diviseur » et l’autre « pour un appareil de frein [...] pouvant arrêter en moins de cinq secondes un train de chemin de fer lancé à toute vitesse » [5].

En 1859, il Vincent épouse Madeleine Thérèse Marthe Petit, fille d’un coiffeur (deux années plus tard, Émile se marie avec la sœur de Marthe). Dans l’acte d’état civil, il est présenté comme un « ancien agent voyer ». On ignore ce qu’il devient ensuite.