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Sauvestre, Clarisse (née Clairian)
Article mis en ligne le 13 avril 2018

par Desmars, Bernard

Née le 4 novembre 1810 à La Chartre (aujourd’hui La Chartre-sur-le-Loir, Sarthe), décédée le 5 février 1892 à Paris (17e arrondissement). Enseignante à Blois, puis à Bonnétable (Sarthe), directrice d’une École professionnelle de jeunes filles à Paris.

Clarisse (ou Claire) Clairian est la fille d’un marchand épicier et cirier. Elle écrit des poèmes qui sont publiés en 1845 sous le titre Les Échos du Loir. Elle demeure alors à Blois, où elle est « maîtresse de pension » ou « institutrice » [1]. Elle envoie l’ouvrage à la Société d’agriculture, sciences, arts et belles-lettres d’Indre-et-Loire. Selon le rapporteur,

l’auteur, qui unit à un esprit fin et cultivé, à une imagination rêveuse, une simplicité et une modestie rares, a parsemé son joli recueil de peintures parfois aimables, riantes ; plus souvent tristes et mélancoliques, mais toujours vraies et heureuses [2].

En février 1846, lors de son mariage avec l’instituteur Charles Sauvestre, elle se présente encore comme « maîtresse de pension » à Blois. Le couple s’installe à Bonnétable (Sarthe) où Charles Sauvestre dirige l’école communale. En 1847, un enfant naît, Charles Léon Stephen. Lors du baptême, selon un habitant de Bonnétable, l’enfant « ne fut pas emmailloté comme le commun des mortels : une caisse remplie de son lui servit de berceau ; et là-dedans, débarrassé d’ignobles entraves, il put jouer des jambes et des bras tout à fait à son aise » [3]. Quelques années plus tard, Clarisse Sauvestre met en valeur cette liberté donnée au nouveau-né dans un article qu’elle fait paraître dans la revue L’Éducation nouvelle, dirigée par son condisciple Jules Delbruck [4].

D’après des témoignages tardifs et très hostiles au couple Sauvestre, Clarisse aurait « tenu la classe des petits », en usant fréquemment de châtiments corporels, comme son mari : elle « se servait simplement de son aiguille ou d’une épingle dont elle piquait les doigts de ses marmots pour graver dans leur souvenir la bonne manière de tenir la plume. Chez Madame, la grande punition était le fouet […] Le coupable, couché sur un banc, la blouse relevée, offrait la surface idoine. Madame commençait, et chaque élève tapait à son tour » [5]. Pourtant, d’après le maire de Bonnétable, elle n’a pas d’activité professionnelle ; « elle est l’auteur de quelques poésies » et manifeste « une certaine excentricité commune aux femmes auteurs […] [qui] a pu jeter sur elle un peu de ridicule » [6].

Le couple quitte Bonnétable au printemps 1848 et part vivre à Paris. Stephen est bientôt placé dans l’école de Philibert Pompée, qui utilise une pédagogie très novatrice. Il finit sa scolarité à l’École libre d’architecture, où enseigne Lecoq de Boisbaudran, puis travaille dans l’entreprise de Gustave Eiffel. Il est l’un des concepteurs de la tour Eiffel.

La formation professionnelle des femmes

Dans les années 1860, Clarisse milite, aux côtés d’Élisa Lemonnier, en faveur de la formation professionnelle des jeunes filles. La Société pour l’enseignement professionnel des femmes, présidée par Élisa Lemonnier ouvre une première école en 1862, puis une seconde en 1864 dont Clarisse Sauvestre prend la direction. L’établissement, situé rue Rochechouart, propose à la fois une formation générale (langue française, arithmétique, histoire, géographie, notions d’histoire naturelle, de physique, de chimie et d’hygiène, dessin linéaire et dessin d’ornement, musique vocale) et des enseignements professionnels : cours de commerce, tenue des livres, comptabilité, éléments de droit commercial, anglais, dessin industriel. S’y ajoute un atelier de couture et de confection [7]. Les cours de musique sont fondés sur la méthode propagée par Émile Chevé.

Utilisant son expérience à la tête de cet établissement, elle publie en 1868 un bref Guide pratique pour les écoles professionnelles de jeunes filles, afin de proposer « aux institutrices, aux familles les programmes et les méthodes expérimentées » dans son établissement [8]. En 1874, elle ouvre avec une certaine « Mme Dufaure (de Genève) », « des cours professionnels pour les jeunes filles qui se déroulent l’après-midi du lundi au samedi (sauf le jeudi) » ; l’enseignement comprend « les connaissances pratiques pour le commerce et la confection, et en outre la langue française, l’anglais, le calcul rapide, la géographie commerciale, la calligraphie » ; s’y ajoutent du droit et un cours sur l’histoire du travail, assuré par Charles Sauvestre [9].

Son Guide pratique lui vaut une mention honorable à l’Exposition universelle de 1878 ; deux ans plus tard, elle est faite officier d’Académie [10].

Après la mort de son mari qui bénéficiait de subsides ministériels, elle reçoit du ministère de l’Instruction publique une indemnité annuelle de 800 francs, complétée, par un versement exceptionnel de 1 000 francs pour les frais d’obsèques de Charles Sauvestre [11].